K. PETIT APERÇU DE L'AVENIR le plus probable de l'édition française
Si vous vous
demandez à quoi ressemblera demain l'édition française, je peux
vous en faire un portrait hurlant.. de terreur et d'abjection. Cela
s'est produit le 10 février 2014. Une heure après cette rencontre
anhistorique, j'avais encore des nausées et, depuis, je traîne un
vague relent qui ne se dissipe pas tout à fait. Je vais donc essayer
de ne pas avoir le mal de mer, en vous racontant "ça" par
le menu.
Suite à une
rencontre hasardeuse qui a mené à une autre puis une autre, je suis
tombé dans le collimateur d'un individu qui a pour "projet"
de devenir éditeur. Dans la mesure où il n'y connaît strictement
rien (et qu'il est parallèlement en train de monter un "projet"
consistant à "faire payer des artistes" pendant le
festival d'Avignon1),
il cherche des futurs collaborateurs (c'est-à-dire, des gens qui
pourront faire le boulot à sa place) ; bref, il était
intéressé par mon "profil" (pour parler comme un D.R.H.
ou un personnage de série-télé américaine).
Décrivons le
personnage, que j'appellerai ici le Dr T.2
Il a la trentaine finissante, de l'énergie à revendre (frôlant la
maladie de Parkinson) ; il est toujours en train de parler,
physiologiquement incapable d'écouter autrui ou de rester en place
plus d'une minute3 ;
ne laisse jamais finir les phrases de ses interlocuteurs, estimant
qu'il a le droit de leur couper la parole parce qu'il sait "d'avance
ce que vous pensez" ; ce qui ne l'empêche pas de prétendre
à tout bout de champ qu'il veut connaître votre avis (sauf que,
quand vous vérifiez s'il a compris, il se met à parler d'autre
chose) ; évoque sans cesse ses commanditaires et clients, dont
il ne donne jamais l'identité ni la fonction (ce sont des "gens
sérieux ; mais attention, je respecte les artistes, moi" ;
ce qui ne l'a pas empêché de vous poser un lapin parce qu'il avait
des "financiers à voir, et que ce sont des gens avec qui on ne
peut pas plaisanter") ; il a le mot respect en
permanence au bord des lèvres, comme s'il se retenait de le vomir
par inadvertance ; il est capable de vous dire sans rire "j'ai
demandé l'autorisation pour toi ; c'est bon, j'ai le feu vert"
sans dire de quoi ni par qui vous devez être autorisé ; il
mentionne toutes les dix minutes les "trucs super qu'il a
dégotés" mais fait le mystérieux quand on lui demande de quoi
il s'agit exactement ; il est presque inculte, allant jusqu'à
se prétendre autiste pour justifier d'une dyslexie carabinée qui
rend ses e-mails quasi incompréhensibles ; incapable de
reconnaître qu'il devrait déléguer ce qu'il ne sait pas faire, pas
plus capable de reconnaître quand il se trompe, estimant que vous
êtes "dithyrambique4"
si vous lui signalez ses très nombreuses fautes (en moyenne deux par
mot), et ne parlons même pas de ses lacunes, qui convergent vers
l'infini ; et, accessoirement, il ne tient jamais ses promesses.
Quant à son cabinet d'expert-conseil en logiciels informatiques,
bien qu'il existe depuis quatre ans, il n'a déclaré aucune
activité.
Je continue à
brosser le portrait ou vous l'avez reconnu ?
Eh bien non, ce
n'est pas Sarkozy. Du moins, pas le "vrai". Ce n'est qu'un
de ses nombreux, grouillants et gesticulants admirateurs. La énième
photocopie du modèle suranné oublié dans la machine en 2012. C'est
lui, le représentant en marche de l'élite économique de demain.
L'homme pressé de vous pressurer. Celui qui a une "montre à
quarks" à la place du cerveau.
Et ce n'est pas
non plus l'éditeur français moyen ; car au moins, l'éditeur
français moyen a le goût (relatif) de reconnaître que la loi lui
préconise de respecter les droits de ses auteurs, même s'il ne le
fait pas vraiment ensuite ; l'éditeur français moyen connaît
la loi (ou bien il paye des gens qui la connaissent) et se doute
qu'une partie de ses auteurs la connaissent aussi ; il sait que
s'il commet une bourde grossière, l'auteur fâché pourrait bien le
poursuivre en justice, ce qui n'est pas bon pour l'image de marque.
Le Dr T., lui, l'image de la marque, il s'en tape, puisque c'est la
marque qui le paye ; il n'a pas la moindre intention (je veux
dire qu'il le déclare, devant témoins, mot pour mot, sans
sourciller ni déglutir) de respecter les droits des auteurs qu'il va
publier. Il estime que vouloir faire ça, c'est "penser comme un
vieux de 70 ans". Non seulement il le dit devant témoins mais
il l'enregistre même dans un dictaphone.
Ah, oui, j'avais
oublié de vous dire qu'il enregistre tout ce qu'il fait ;
j'avais peur que vous ne me croyiez point. Afin de vous donner une
idée de l'existence palpitante que mène le Dr T., apprenez que
l'intro' de son enregistrement du jour consistait en ces mots :
"Aujourd'hui, 10 février 2014, réunion informelle sur le
projet d'édition, avec *** et Alfred Boudry5.
Vous allez pouvoir écouter les idées qu'on va mettre en place..
Euh.. Bon, c'est parti."
C'est qui,
"vous" ?
Vous en
connaissez beaucoup, des gens qui font écouter à autrui les
conversations "informelles" qu'ils ont avec des
collaborateurs putatifs ? De trois choses, l'une : ou ce
type est mythomane, ou il est paranoïaque, ou il est téléguidé.
Non ?
Ajoutons à cela
que, lorsque je lui ai signalé – par pur souci
d'information – que le fait d'enregistrer quelqu'un sans son
consentement pouvait constituer une violation des Droits de l'Homme,
il a haussé les épaules en précisant bien qu'il s'en foutait,
qu'il y avait des "trucs plus importants". Pour qui ?
Précisons en
passant que l'objet de la réunion en question était que je lui
dresse un portrait de l'édition française et que je lui explique
les droits et les devoirs d'un éditeur français vis-à-vis de ses
auteurs. Vous apprécierez l'implication du Dr T. dans son futur
"métier" quand vous saurez que, durant les cinq minutes
trente secondes de l'entretien, je n'ai pas réussi à terminer une
seule phrase, puisqu'il les a toutes balayées d'un revers de main,
les remplaçant par "Non, mais nous, c'est pas comme ça qu'on
va faire !"
C'est qui, ce
"nous" ?
Il est fort
probable que, par "les idées qu'on va mettre en place", il
voulait dire les idées de mes patrons que je vais
vous fourrer au fond du crâne en passant par le cul. Les années
1980 et 90 avaient produit quelques curiosités : le notaire
surgi du néant voulant devenir éditeur à coups de rachats de
vieilles maisons (il a fini suicidé dans une voiture) ; ou
l'ex-patron d'une usine de bonbons qui organisait ses conseils
d'administration les nuits de pleine lune... Les années 2010
innovent, en ce sens qu'elles défèquent sur le marché une nouvelle
génération de futurs éditeurs ; ceux qui ne savent même pas
ce qu'est un bouquin.
Voici maintenant
quelques indices pour tenter de deviner quel marionnettiste tire les
ficelles du Dr T. (je vous épargne les divers borborygmes,
atermoiements et airs de conspiration dignes d'un film de gangsters
français de série-B des années 50) : il appert donc qu'il
agit pour le compte d'un grand groupe de distribution qui se trouve
être au 2e rang mondial de son domaine. Pas Wal-Mart ;
l'autre. Celui dont le nom évoque un croisement.
Il ressort donc
de la logorrhée inepte du Dr T. que l'avenir de la librairie en
France passe par les supermarchés, qui vont bientôt adopter une
formule "innovante et révolutionnaire" (à traduire du
jargon publicitaire ; sens réel : "débile et
débilitante"), adaptée à la "nouvelle réalité
économique" (vous avez remarqué ? l'économie n'est plus
"un marché" mais "la réalité" ;
sous-entendu, si vous la niez, c'est que vous vivez dans l'illusion,
que vous êtes fous). Et la réalité, c'est celle des "espaces
culturels" à l'intérieur des supermarchés. Chic ! Vous
allez pouvoir acheter les livres du Dr T. en même temps que
votre viande industrielle, vos yaourts sans matière et vos packs de
chaussettes pré-trouées. Et, bien entendu, le fait que les
dernières vraies librairies vont disparaître précisément à
cause de cette pseudo innovation culturelle n'a pas à être pris
en compte. C'est le "progrès", celui que personne ne peut
arrêter, pas même la police de la pensée.
Plus "beau"
encore ? Le Dr T. n'hésite pas un instant à déclarer
fièrement qu'il a l'intention de vendre "ses
livres comme si c'était du dentifrice". Vous noterez qu'il n'a
pas le courage (relatif) de dire balais à chiottes ou PQ, mais on
est quand même dans la salle de bains.
Vous croyez que
c'est tout ? Ajoutons encore deux cerises en plastique sur cette
tarte en carton : au moment de partir, la collaboratrice du
Dr T. m'explique (sans me regarder dans les yeux) qu'il est
"normal de devoir se vendre ; il faut s'adapter à la
nouvelle économie". Bien sûr, elle ne prononce pas le mot
"prostitution" ; peut-être parce que la prostitution
va redevenir un concept respectable, comme le cinéma porno et les
bordels chics.
Deuxième
cerise : qu'a l'intention de faire le Dr T. si un auteur
arrive dans son bureau avec un livre tout prêt à publier, tout
bichonné, tout beau, tout bien travaillé, bref, correspondant à
ses désirs d'auteur, qui sont ses droits, qui sont donc à respecter
selon les termes de la Loi ? Réponse (beuglée dans le
dictaphone, avec postillons multi-directionnels et l'Œil-du-Tigre
qui s'apprête à bouffer une souris mécanique : "Il
dégage ! Je vais pas m'emmerder avec. Et c'est pas ce que
veulent mes clients." Je ne change pas un mot. Traduction en
français non commercial : je ne publierai pas des livres que
je n'aurai pas transformés en merde facile à digérer, avec dedans
les idées qui doivent satisfaire mes
clients.
Vous aurez noté
que les clients du Dr T. ne sont pas les futurs acheteurs de ses
livres mais les gens pour qui il travaille. Quand on prend le monde à
l'envers, c'est plus facile de lui faire les poches, pas vrai,
puisqu'elles sont retournées ?
Attention, je
n'ai pas affirmé que le Dr T. était un escroc ; mais si
c'était le cas, il aurait le même comportement et s'exprimerait de
la même manière, à savoir celle d'une petite frappe de la pègre
qui vient de prendre la place de son ex-supérieur, suite à une
"défection inattendue".
De quel calibre,
la défection ?
Bien sûr, je
n'ai aucun moyen de savoir si ce que dit le Dr T. est vrai ou
issu de son imaginaire caractériel, mythomane, paranoïaque,
sociopathe, imbu de lui-même, dément, fruste, grossier, puéril,
chafouin, retors, monomaniaque, obsessionnel, bref : odieux.
Mais le fait est que, s'il était un escroc, il ne s'exprimerait pas
autrement.
C'est donc lui,
le nouvel éditeur de demain : la petite crevure hyper-secouée
du bulbe rachidien et intégralement dépourvue de vergogne, qui se
croit tout permis parce qu'elle se croit vedette dans un film de
Martin Scorsese.
Aujourd'hui,
quarante ans après la main mise des gras groupes de distribution sur
la littérature française et la culture en général, on assiste
donc à l'éclosion d'une nouvelle génération de régurgiteurs de
produits culturisés : celle des fanatiques de l'économie
rentable, pour qui les êtres humains ne sont rien d'autre que des
vaches à traire, des esclaves qui paient leurs chaînes et qui sont
priés de trouver ça normal ou d'aller crever. Le plus abject étant
que la plupart de ces esclaves les soutiennent pleinement et se
proclament heureux de le faire, T-shirt et casquette de marque à
l'appui, vocabulaire mafieux à la bouche, les $ et les €
clignotant au fond des yeux. Pour eux, c'est vous qui, en défendant
vos droits et votre liberté de conscience, n'êtes qu'une vieille
merde dépassée, un empêcheur de chier en rond, une relique bonne à
enfermer6.
George Orwell et
quelques autres avaient bien prévu l'anéantissement de la pensée
humaine et son retournement contre elle-même ; mais c'est une
chose de le lire dans un livre, et c'en est une autre de le vivre
dans la réalité, de voir et d'entendre des consciences réputées
humaines se déliter sous vos yeux pour prendre tout à coup la voix
du fanatisme le plus demeuré, et vous dire que, si vous résistez,
vous allez être broyé et que vous l'aurez bien mérité. Le
compromis est désormais non seulement intégré comme moyen
"naturel" de survivre, c'est aussi devenu la solution
évidente puisque unique. La soumission à l'ordre venu d'en-haut est
désormais le seul acte que l'on exige des individus, et on lui prête
même la réputation d'être un acte aussi salutaire que volontaire.
L'impuissance résignée est devenue la condition sine qua non
pour trouver (entendez mériter) un emploi, ce nouveau
graal de l'imaginaire social. La démence est devenue la norme. Si
vous n'êtes pas d'accord, l'asile et la misère seront votre lot..
et il ne sera même pas de consolation.
Je ne doute pas
un instant que le Dr T. (dont, soit dit en passant, j'ignore le
vrai nom, puisqu'il n'a jamais daigné le décliner7)
deviendra rapidement un gros éditeur, à la tête d'une écurie de
bons chevaux de trait bien jeunes, élevés aux hormones de
croissance cannibales, aux œillères savamment ajustées, à la
culture aussi superficielle que celle d'un parfait soldat. Du haut de
son mépris souverain, il régnera sur son cheptel, tel un Vice-Roi
sur son peuple soumis par la Terreur, dictant sa Loi divine et
foudroyant de sa Vindicte ceux qui osent seulement rêver de
dissidence, de droits d'auteur, de dignité, de liberté ; bref,
les cons que nous sommes et que nous méritons d'être à ses yeux et
à ceux de ses souteneurs courageusement planqués derrière leurs
montagnes de fric et des lois putassières.
J'irai même plus
loin : étant donné que le record de mauvaise foi a été
pulvérisé, anéanti et "reversé dans la stratosphère"
par cet individu, je prédis que dans dix ans, il (c'est-à-dire ses
marionnettistes du groupe Carrefour8)
aura racheté France-Loisirs, Hachette et Havas ; et dans vingt
ans, Gallimard sera une marque de PQ. Mais attention ! Pas
n'importe quel PQ : du PQ prestigieux et littéraire, du PQ à
Goncourt, puisque les romans du futur seront directement imprimés
dessus.
Gringo! t´auras
rien de nous
De ma mémoire de titan,
mémoire de ´tit enfant ;
Ça fait longtemps que je t´attends.
Gringo ! Va-t-en ! Va-t-en !
Allez, Gringo ! Que Dieu te blesse !
De ma mémoire de titan,
mémoire de ´tit enfant ;
Ça fait longtemps que je t´attends.
Gringo ! Va-t-en ! Va-t-en !
Allez, Gringo ! Que Dieu te blesse !
Richard
DESJARDINS, Les Yankees
_______________________________________
L. BILAN 2016 de l'(in)activité de mes éditeurs
Donne un cheval à
celui qui dit la vérité, il en aura besoin pour s'enfuir.
Proverbe
afghan ou ukrainien ou kamikaze
Voici quelques
anecdotes récentes et parfaitement authentiques qui vous donneront
un aperçu (un de plus) de la vie quotidienne des écrivains
français :
- Pour la
première fois depuis 2008, les éditions L'Atalante ont "oublié"
de m'envoyer la reddition des comptes de La bibliothèque
nomédienne, ainsi que le règlement des droits de prêt, de
l'année 2013 ; comme cet incident fait suite à un autre datant
de l'an dernier (le comptable m'avait envoyé la reddition d'un autre
auteur et n'avait pas apprécié que je lui demande de... corriger
son erreur), on peut se demander si cet oubli en est bien un.
Vous avez pensé
"Revanchard... Puéril..." ?
- Les éditions
Au Diable vauvert ont un retard de trois ans dans leurs redditions
des comptes, en plus du fait que j'ai des doutes sur la validité des
chiffres avancés (pourquoi ? eh, tiens ! parce que j'ai
travaillé plus de quatre ans aux côtés de Marion Mazauric, donc je
sais "ce qu'elle vaut"). Le problème, c'est que je ne peux
vérifier ces chiffres qu'en les réclamant... à l'éditeur !
Vous avez pensé
"Y a un truc qui cloche, là, non ?" Alors, c'est que vous
ignorez tout des merveilleux mécanismes réputés "légaux"
qui régissent les rapports entre auteurs et éditeurs ;
c'est-à-dire : qui permettent aux gentils éditeurs de se
protéger contre les méchants auteurs.
Le seul recours
strictement légal qu'un auteur a contre un éditeur malhonnête,
c'est de prouver que deux (au moins) ventes de ses livres n'ont pas
été honorées alors que le livre n'est pas épuisé. Quelqu'un
peut-il m'expliquer concrètement comment on fait pour surveiller les
trois mille librairies et douze mille points de vente de France et
recevoir les témoignages des clients lésés ? Molt obrigado...
- Pour la
deuxième année consécutive, les éditions de L'Aube ont "oublié"
d'envoyer la reddition des comptes de mon roman Les Désamants
(co-écrit avec Héléna
Demirdjian), pour lequel ils ont d'ailleurs fourni un effort minimal
en matière de diffusion. Ils ont pourtant eu plusieurs fois
l'occasion de briller, dont une qui ne leur aurait rien coûté :
en effet, le livre est sorti le 1er
juin 2012, c'est-à-dire en pleine
Comédie du Livre à Montpellier, ville où habitait ma co-auteur
(moi-même ne me trouvant qu'à 40 km) ; un partenariat avec
n'importe laquelle des librairies participantes aurait été simple
comme de l'eau de roche ; ils n'ont même pas essayé. Encore
mieux : le siège des éditions de L'Aube se trouve à 30
kilomètres de la ville de Manosque où se déroule chaque année le
Festival littéraire des Correspondances ; comme son nom
l'indique, celui-ci favorise la littérature de... correspondances.
Or, Les Désamants est
une... correspondance. Je la refais au ralenti ou ça va ?
N'importe quel âne bâté aurait fait le rapprochement ; mais
pas ceux de L'Aube. Ils ont préféré nous envoyer... chez Cultura,
dans la banlieue de Marseille, un samedi avant les fêtes de fin
d'année, sans la moindre publicité préalable ; la responsable
de la maison (une étudiante à peine sortie de l'école, à qui nous
avons donc servis de "cobayes") nous a laissés seuls au
bout d'une heure, et la libraire a disparu une demi-heure plus tard.
Depuis :
rien. Même pas de reddition des comptes ; ce qui est illégal.
On saisira encore
mieux l'étendue de leur mesquinerie lorsqu'on saura que j'avais émis
la velléité de faire figurer un portrait de George Bass à la fin
du livre ; j'avais pré-rempli le formulaire de demande de
droits d'exploitation auprès du musée australien qui en possède le
seul exemplaire connu ; il n'y avait plus qu'à le remplir,
l'envoyer par e-mail et payer le montant. L'éditeur a refusé. "Trop
cher ?" pensez-vous. A vous de voir : la somme à
débourser s'élevait à 44 $ australiens, soit une trentaine
d'euros.
Vous avez pensé :
"Mesquins... Minables..." ?
- Alors que
j'étais invité à Lyon pour le Festival des Intergalactiques, le
très admiré Mathias Échenay, directeur et fondateur des éditions
La Volte, s'est approché de mon éditeur Davy Athuil (Le Peuple de
Mü) pour lui dire, en souriant et après s'être présenté :
« C'est moi qui ai voté contre l'adoption de ta société par
mon groupe de diffusion. » Après quoi, l'air satisfait, il
rejoignit sa clique.
De deux choses
l'une : ou cet individu est conscient de la portée de ses actes
– auquel cas il est urgent de le retirer de la circulation
pour lui confier une besogne mineure digne de la bassesse de ses
ambitions ; graisser les imprimantes au magasin du coin, par
exemple – ou bien il en est inconscient, c'est-à-dire qu'il
est incapable de distinguer les notions de bien et de mal, auquel cas
il est urgent de le confier à une institution spécialisée où son
comportement socio-pathologique ne pourra plus nuire à autrui.
Dans tous les
cas, il est évident que le succès (relatif, puisqu'il s'agit de
prestige plutôt que de fric) de sa "noble" maison lui est
monté à la tête, et que son pouvoir (hélas, pas du tout relatif)
le rend inapte à la conduite d'une activité professionnelle. C'est
souvent ce qui arrive quand on porte une double-casquette : on
travaille facilement du chapeau.
Vous avez pensé
"Quel connard !" ?
Ajoutons (au cas
où vous lui chercheriez un alibi), que les diffuseurs sont payés au
pourcentage direct, ce qui signifie qu'ils ne peuvent pas perdre
d'argent en diffusant un éditeur au catalogue modeste ;
s'ils ne le font pas, ce n'est donc pas pour des raisons économiques,
mais uniquement pour des questions de pouvoir, pour montrer qui est
le chef, bref : pour étaler leurs testicules en se frappant le
poitrail.
- Les nouvelles
éditions Les Manuscrits Oroboros ont (peut-être sciemment, allez
savoir) sabordé la sortie de mon roman policier-historico-libertin
Fantaisie baroque, grâce à plusieurs ingrédients, tous
rédhibitoires : incompétence tous azimuts, incompréhension
forcenée, tentative d'ingérence, couverture lamentable (cf.
ci-dessous), maquette déplorable et non professionnelle, le tout
assorti d'une obséquiosité gluante digne de personnages secondaires
dans une fresque pseudo-balzacienne qui n'aurait (heureusement) pas
franchi le seuil du XIXe siècle.
Petit détail
technique qui donne la pleine mesure de leur mentalité :
n'ayant pas reçu mon Bon à Tirer par e-mail (lequel s'était égaré
dans les méandres d'Internet suite à une défaillance de serveur),
ces tristes clampins m'ont envoyé une... mise en demeure exigeant
le Bon à Tirer, laissant des indices comme quoi ce serait mieux s'il
était positif (tu m'étonnes !),
au lieu de me donner... un simple coup de téléphone. En quatorze
ans dans le milieu de l'édition française, je n'avais jamais été
confronté à un comportement aussi mesquin, veule et puéril ;
et pourtant, leurs désormais collègues n'ont jamais été en reste,
comme vous le savez.
Vous avez pensé
"Nuls... Amateurs... Crétins..." ?
C'est loin d'être
terminé.
- Comme le prouve
la reddition des comptes 2013 envoyée par actusf, au 1er
janvier 2014, il restait 53 exemplaires de mon roman La
Digitale en stock (passons sur le fait que je n'en ai été
informé que le 11 juillet ; ce genre de retard est plus que
coutumier dans l'édition, et si vous râlez là contre, non
seulement on vous méprise, mais le retard suivant sera encore pire,
voire éternel9) ;
comme le prouve la capture d'écran que voici (datée du 24 janvier
2015), le site d'actusf prétend que le livre est épuisé.
De deux choses
l'une : ou bien l'éditeur a fait pilonner les 53 ex. restants
et a "négligé" de m'en avertir (ce qui constitue une
violation de clause contractuelle) ou bien il ment ; ce qui
constitue aussi une rupture de contrat, en plus d'une répugnante
goujaterie.
J'ai eu depuis la
preuve que les livres n'ont pas été pilonnés ; du moins, pas
tous.
Hélas, ce n'est
pas tout et nous passons maintenant à un stade "supérieur"
d'incompétence.
Voulant obtenir
des explications sur cet état de faits, j'ai envoyé une mise en
demeure (en recommandé avec accusé de réception) au directeur de
cette maison d'édition fort bien réputée (notamment par elle-même,
grâce à son site Internet qui est à la fois un site de promotion
et de critique littéraire, donc de copinage). La première
difficulté fut de trouver son adresse postale ! En effet, le
fichier .pdf contenant la reddition des comptes présente une adresse
en pied-de-page (3 rue de la Banque, 73000 Chambéry) qui ne
correspond pas à celle du site officiel des entreprises en Savoie
(34 avenue des Bernardines, Chambéry) ; embarrassé, j'ai donc
cherché confirmation sur les Pages blanches par Internet et suis
tombé sur... une troisième adresse (15 Bd Vivier-Merle, 69003
Lyon) ! Comment savoir laquelle est la bonne ? La loi
oblige une entreprise qui déménage à changer son adresse sociale,
précisément pour s'assurer que le "responsable" recevra
bien les courriers qui lui sont adressés. Fallait-il en déduire que
l'adresse inscrite au registre des entreprises était la bonne ?
C'est le pari que j'ai fait...
Et devinez quel
fut le résultat ? Je vous le révélerai après lecture du
courrier en question :
___________________________________________________________
à l'attention de
Jérôme Vincent
directeur des
éditions actusf
20 novembre 2014
Monsieur,
suite à
plusieurs relances de ma part auxquelles vous n'avez répondu que par
de vagues promesses dont aucune n'a été tenue, je ne peux
aujourd'hui que constater le délitement de nos relations
contractuelles.
Les redditions de
compte que vous m'avez expédiées au cours des quatre années
écoulées n'ont d'abord consisté qu'en e-mails d'une ligne pour les
deux premières années, ensuite en tableaux pdf expédiés par
e-mails, ne présentant que les quantités, non les répartitions
sociales ; dans tous les cas, vos documents ne sauraient
constituer des feuilles de paye dignes de ce nom, qui sont pourtant
ce dont un auteur a besoin pour ses démarches administratives et que
vous êtes tenu de lui délivrer par le Code de la Propriété
intellectuelle.
En outre, la
dernière action que vous ayez entreprise pour promouvoir mon roman
La Digitale remonte à l'hiver 2010 (Festival Zone Franche de
Bagneux), quelques jours après la sortie du livre ; depuis,
vous n'avez strictement rien fait, allant même jusqu'à prétendre
que le festival des Imaginales d'Épinal n'est "pas vraiment
orienté vers la science-fiction" pour justifier de votre
inaction, ce qui constitue un cas de mépris caractérisé (ou de
désinformation ou de stupidité).
Vous saviez
aussi, dès le début, que La Digitale n'est que la première
partie d'un diptyque ; malgré son succès (450 ex. sur les 500
ont été vendus en deux ans) vous n'avez jamais envisagé de publier
la seconde.
J'ai aussi, par
e-mail daté du 14 juillet 2014, demandé à ce que vous emmeniez
tout ou partie des exemplaires restants de La Digitale pour la
3e édition des Intergalactiques de Lyon où vous étiez
présent et où j'étais invité (par un autre éditeur) ; ce
que vous vous êtes bien gardé de faire, violant ainsi une nouvelle
fois votre devoir éditorial d'exploitation permanente et continue.
Pire encore, il
apparaît clairement sur le site web de votre maison d'édition que
mon roman est à ce jour annoncé comme "épuisé", ce dont
vous ne m'avez jamais informé, alors que vous y êtes
contractuellement tenu (troisième violation). Le tirage initial
ayant été de 500 exemplaires et la dernière reddition faisant état
de 53 exemplaires restants, je me pose légitimement la question de
savoir où est passée la différence. Si ces 53 ex. ont été
pilonnés, vous étiez tenu de m'en informer dans un délai d'un
mois ; si ce n'est pas le cas, vous commettez une quatrième
violation des termes du contrat. Une réponse de votre part est plus
qu'urgente à ce sujet.
Ajoutons à cela
qu'à deux reprises vous avez émis l'idée de procéder à une
seconde édition, promesse que vous n'avez pas tenue, si tant est que
vous en ayez jamais eu l'intention réelle.
Il s'évince des
éléments mentionnés ci-dessus (et de plusieurs autres, presque
négligeables en regard de ceux-ci) que le contrat qui nous lie
depuis le 22 décembre 2009 ne peut légitimement continuer à être
éxécuté, étant donné les méthodes déloyales et insincères que
votre maison d'édition pratique.
Dès lors, je
vous informe qu'à compter du 22 décembre 2014, date anniversaire de
la signature du contrat, je mets un terme définitif à ce dernier et
retire aux éditions actusf le droit d'éditer, distribuer et
diffuser mon roman La Digitale.
Je vous saurais
gré de bien vouloir me faire parvenir une reddition des comptes
complète, accompagnée de tous les documents afférents mis à jour
et les éventuels versements restants dus, dans un délai de deux
mois à compter de la première présentation de ce courrier
recommandé. Faute de quoi, j'en tirerais toutes les conséquences de
droit.
Vous souhaitant
bonne réception de la présente, recevez, monsieur, mes salutations,
AB
____________________________________________________________
Apprenez donc que
ce courrier recommandé m'a été renvoyé au bout d'un mois ;
il avait été dévié par la Poste sur une... quatrième adresse :
45 chemin du Peney, Chambéry !
Vous avez pensé
"Évasif... Fuyant..." ? Vous n'êtes pas au bout de
vos surprises.
Non seulement le
gérant-fondateur d'actusf n'officie pas à l'adresse indiquée, mais
il n'est pas allé retirer le courrier recommandé dont il a été
dûment avisé. Excellent moyen d'échapper à ses
responsabilités (si on peut encore appeler ça ainsi).
Vous avez pensé
"Lâche... Illégal..." ?
Il va de soi que
je considère le contrat qui me lie à ce triste sire comme rompu, et
que ce qu'il a à en dire ne m'intéresse pas, puisque sa parole ne
vaut strictement rien. Le fait que ce soit lui et une poignée
d'autres sbires de la même espèce qui fassent la pluie et le beau
temps du milieu littéraire SFFF me vaudra certainement un
enterrement de dernière classe ; ça ne me changera pas
beaucoup.
PS : je
pourrais ajouter une couche de merde supplémentaire à ce portrait
craché d'éditeur médiocre et si typiquement franchouillard, mais
la loi du silence fait taire le seul témoin qui me permettrait d'en
garantir l'authenticité ; sachez donc que la vérité est
encore plus puante. Et l'histoire est donc loin d'être terminée,
puisque l'individu Vincent a répondu. Précisons toutefois que sa
définition du mot "réponse" ne correspond pas forcément
à ce que vous seriez en droit d'espérer, si vous avez été élevé
par des êtres humains.
- En 2014, j'ai
été contacté par un éditeur (La Matière noire) qui, intéressé
par les articles lus sur mon blog Le Bazar impertinent, envisageait
de publier Il était une mauvaise foi. Après plusieurs
échanges par e-mail et quelques rencontres physiques apparemment
prometteuses, le projet semblait bien parti (au point que j'avais
rédigé une Profession de foi, destinée à apparaître en
tête d'une revue qui avait pour but de soutenir la parution du
pamphlet).
Au bout d'un an
et demi de tergiversations, l'éditeur en question a.. disparu corps
et âme. Aux dernières nouvelles, ses "chiens avaient rongé
ses câbles Internet". C'était en février 2016.
- quant au Peuple
de Mü, il lui a fallu moins de trois ans pour devenir comme ses
nouveaux collègues (si tant est qu'il ne soit pas devenu comme eux
exprès, pour s'en faire bien voir, ou parce que ceux-ci lui en ont
intimé l'ordre tacite). Je ne sais s'il faut en tirer une règle sur
le "métier" d'éditeur. Mais quoi qu'il en soit, en ce qui
me concerne, la coupe est pleine.
________________________
M. PROFESSION DEUX FOIS
Le texte suivant devait figurer en éditorial du premier numéro de la revue Equilibre qui aurait dû appuyer la publication de ce pamphlet.
Son éditeur putatif ayant disparu au champ d'honneur10, je le pose ici, in memoriam.
Profession...
Récemment,
la notion d'objectivité a été effacée de la liste des qualités
exigées de tout journaliste, liste établie par des membres éminents
de cette profession. Sous prétexte que l'objectivité véritable ne
saurait être atteinte - et qui oserait le prétendre ? -,
elle a été rayée des consciences pour être remplacée par une
subjectivité réputée assumée, porte ouverte à toutes les
inepties. Ceux qui en doutent n'auront qu'à consulter en guise
d'exemple la page "actualités" de Yahoo, afin de mesurer
la nullité abyssale des sujets qui préoccupent ses rédacteurs.
Plus
prudent, le monde de l'édition ne s'est jamais targué d'objectivité
mais ses membres les plus éminents n'ont jamais tari d'éloges pour
se congratuler mutuellement, mettant en avant leurs qualités
supposées de : dénicheurs de talents, organisateurs de coups
médiatiques, promoteurs de génie(s)... bref, "faiseurs"
de littérature. Soutenus dans cette illusion prépubère par une
classe politique croyant encore au prestige de l'écrit et à sa
suprématie sur les autres formes d'art, les maîtres-encaisseurs de
l'édition française prolongent l'agonie d'une culture moribonde qui
prétend ignorer son cancer de l'âme en répétant tous les dix ans
que l'art est mort, ce qui leur confère le droit de faire de la
merde.
Exécuté
par les pontifes du culte éditorial hérité du XIXe
siècle industriel, ce sacrifice "permanent et continu" aux
dieux du négoce a pour principales victimes les écrivains
eux-mêmes, ainsi qu'un certain public devenu une masse informe de
consommateurs fanatisés par les évangiles pavloviens de la
publicité et de l'édition à la chaîne. Au XXIe siècle,
l'édition littéraire est toujours une religion, vaguement
re-liftée, dont les best-sellers sont les miracles brandis comme
autant de "preuves" pour convertir les fidèles par
millions. Les dévoreurs insatiables de Harry Potter, Dan Brown et
autres Nuisances de Gris ne sont que les ouailles d'un culte
néo-libéral qui a su tirer le profit maximal des techniques de
manipulation de masse innovées au XXe siècle par des
nazis, rendues honorables par Edward Bernays, et ridiculisées par..
personne à ce jour.
N'aurait-on
pas perdu quelque chose d'important, entre deux guerres
mondialisées ?
On
a perdu ce qui disparaît quand la passion aveuglante est remplacée
par la foi aveugle ; quand l'art inestimable est remplacé par
la valeur marchande ; quand le récit mythique est occulté par
la critique académique ; quand l'imaginaire individuel est
escamoté par la reconnaissance universelle.. On a perdu ce qui
s'évanouit quand la marque Star Wars réussit à faire croire à des
millions de gens qu'elle est à la pointe de la science-fiction ;
quand le messie Harry Potter fait croire qu'il révolutionne le
fantastique ; quand Houellebec et Despentes font croire qu'ils
écrivent vachement bien ; quand Apple et Microsoft font croire
que, sans eux, l'informatique populaire n'aurait jamais existé ;
quand les politiciens font croire qu'ils se soucient du peuple..
Il
n'y avait pas de raison pour que l'évolution historique du monde de
l'édition échappât à ce mouvement de mépris
général. Si aujourd'hui, la part de bénéfice qui
revient à l'auteur diminue sans cesse au point qu'elle va bientôt
disparaître, c'est aussi parce que les éditeurs se prennent de plus
en plus pour des artistes, persuadés par eux-mêmes que leurs
paroles et leurs opinions ont de l'importance, oubliant de plus en
plus que ce sont eux qui devraient être au service des auteurs, non
l'inverse, et que les auteurs ne sont pas au service d'un public
unifié et gérable, mais seulement les complices de gens encore
capables d'éprouver un authentique désir.
Editeurs
discrets, auteurs géniaux et public curieux sont en voie
d'extinction ; à la place, on a désormais des gourous
gestionnaires, des moines photocopistes et des brouteurs d'évangile.
..de
foi ?
La
dernière fois que j'ai entendu parler de foi sans connotation
religieuse, c'était dans Citizen Kane11.
En 1941, donc. Certes, je n'étais pas né, mais les œuvres d'art
ont justement pour caractéristique d'être intemporelles, et de
toujours avoir du sens, quel que soit le contexte.
"Foi"
vient de l'ancien français feid, dérivé du latin fides,
confiance. C'est le mot qui a donné fidélité, bien sûr, mais
aussi féodal, terme qui résume le système politico-économique sur
lequel repose tout le moyen âge européen12.
Aujourd'hui, le mot "foi" désigne une croyance
inébranlable en quelque chose qui ne peut se prouver. Récupérée
par la religion, la notion de fides a perdu de vue
l'importance de l'élément humain pour le remplacer par l'élément
divin, réputé supérieur, ineffable, digne de sacrifice, etc.,
bref, la pierre de touche d'un monde transcendantal censé susciter
la meilleure part de chacun ; comme si quelqu'un qui tue au
nom d'un dieu était meilleur qu'un autre qui tue en son nom propre,
et comme s'ils étaient tous deux meilleurs que quiconque.
Résumons mille ans d'obscurantisme : la parole divine a
dévalorisé (voire dévalué) la parole humaine, tout comme l'écrit
religieux a peu à peu détruit la culture orale et la subjectivité
de chaque conteur pour en suppléer l'évangile, cette parole écrite
réputée immuable, garantie par une autorité prête à tuer pour
imposer sa lecture unique à des consciences multiples.
Cet
appauvrissement mental doublé d'un asservissement moral continue
aujourd'hui à régner sur le monde de l'écrit ; fanatiques
massacrant au nom de l'interprétation de leurs maîtres, simples
obstinés ne jurant que par la littérature blanche ou par les
classiques ou ne lisant jamais de romans "parce que ce n'est pas
sérieux", les bigots de toute chapelle existent lourdement,
infligeant leurs normes à ceux qui se voudraient libres grâce aux
livres. A tous les livres.
Les
suzerains de l'édition imposent leurs lois scélérates, leurs goûts
étriqués, leurs pratiques abjectes, leurs opinions surannées et
académiques, à une population assommée qui, tout désir enfoui,
n'a même plus conscience de ses propres talents, les étouffant
elle-même dans l'œuf ou, au mieux, cherchant à les faire
ressembler à ce qui existe déjà dans l'espoir d'être reconnu le
plus tôt possible.
Il
est pourtant évident que pour être reconnu, il faut être déjà
connu, donc ne rien dire de neuf. C'est ce qui explique que la
plupart des artistes qui parviennent à vivre de leur art ne sont que
des perroquets ou des ânes, des singes ou des linottes, des chiens
ou des chats, bref, des animaux de cirque et de compagnie, pérorant
à foison dans les microphones que leur tendent des journalistes à
mémoire courte et fiers de leur subjectivité assumée, répandant
un discours prévisible et creux dans les consciences en voie
d'extinction d'un public toujours plus retiré en lui-même, enfermé
chez lui, rivé devant des écrans de surveillance déguisés en
fenêtres-sur-le-monde, séparé du monde réel.
Le
livre est un objet libre. Les fanatiques sont faciles à
reconnaître : il y a toujours un livre qui leur fait peur.
Profession :
profession
Mon
vrai métier, c'est musicien ; sinon, je suis pion dans un
collège.
Antoine
PUAUX, du groupe Narrow Terrence
Depuis
les années 1980, l'enflure égotiste des éditeurs13
est allée de pair avec l'augmentation de leur part de revenus
(entraînant l'effondrement des revenus de l'auteur), de leur
collusion avec les distributeurs-diffuseurs, ces obscurs médiateurs
promus littérateurs par des décennies de mercantilisme, le tout
grâce à la complicité de pouvoirs publics émasculés et asservis
à des causes de plus en plus douteuses, invisibles et lointaines.
Le
seul moyen de les remettre à leur place serait de les contraindre à
appliquer le principe "Gavte la Nata", selon l'expression
lombarde évoquée par Umberto Eco dans Le Pendule de Foucault,
signifant qu'ils feraient mieux de s'ôter le bouchon du trou du cul
afin de désenfler et de retrouver des proportions humaines. Hélas,
il est à craindre qu'ils ne le feront jamais d'eux-mêmes et qu'il
serait bien plus efficace de leur crever la panse. Littéralement.
La
répartition des revenus devrait être de 25 % pour chacun des
acteurs principaux de la chaîne du livre : l'éditeur, le
diffuseur-distributeur, le libraire et l'auteur. C'est cela qui
serait normal ; c'est cela qui devrait être ; c'est cela
qui doit être. Si les éditeurs estiment qu'ils sont pris à la
gorge par les diffuseurs, n'est-il pas étrange qu'ils s'acharnent
sur les auteurs plutôt que sur les responsables qu'ils sont
correctement identifiés ? Tout argument en faveur d'un
déséquilibre de cette formule est aussi intéressé qu'hypocrite,
et ne peut qu'entraîner confusion, mépris et haine larvée.
Dans
ces pages, j'expliquerai comment la littérature d'aujourd'hui est
toujours soumise aux lois de l'ancien régime féodal. Je montrerai
comment une telle abjection a été rendue possible par la lâcheté
de ceux qui maintiennent un état de guerre permanent ; je
décrirai en détail les méthodes réelles pratiquées par les
monstres increvables de l'édition néo-libérale ; je mesurerai
la distance qui sépare leurs discours publics de leurs aspirations
réelles ; je tâcherai, en me distrayant aussi, d'éviter de
sombrer dans l'abîme d'ineptie qu'est leur univers mental ;
enfin, si j'ai survécu jusque-là, je m'efforcerai de dégager des
solutions, existantes ou potentielles, d'imaginer des ailleurs et des
autrement.
La passion, voyez-vous, peut être détruite par un docteur. Elle ne peut être créée. Peter SHAFFER, Equus
_________________________________________________________
En ce qui
concerne le cheval dont parlait le proverbe, figurez-vous que je l'ai
bouffé puisque je n'avais rien d'autre ; du coup, je ne me suis
pas enfui. Je n'ai pas non plus l'intention de me suicider de
désespoir pour faire jouir de sinistres petits malfrats qui se
prennent pour des barons de la haute-bourgeoisie en se grattant les
parties. Je continuerai donc à présenter ici le vrai visage de ces
"faiseurs de littérature" et je le ferai jusqu'à ce que
les choses changent, c'est-à-dire jusqu'à ce que le public sache
enfin distinguer un vrai éditeur d'un salopard ou d'une demeurée.
Je vous donne ici
quelques indices : le vrai éditeur respecte sa parole, respecte
les termes des contrats qu'il signe, respecte la volonté et tous
les droits de ses auteurs, respecte la loi, ne prend pas le public
pour un ramassis d'abrutis, ne fait pas passer ses collègues et amis
en priorité devant ses auteurs, sait faire la différence entre un
ouvrage à succès artificiel et un spontané, lit les livres
jusqu'au bout, ne cherche pas forcément à "fabriquer un
best-seller", corrige ou fait corriger ses fautes, répond quand
on lui parle, etc.
Ce qui élimine
99 % d'entre eux. Faites le calcul : il y a en France au
mieux une cinquantaine d'éditeurs dignes de ce nom. Si seulement
ils pouvaient se regrouper en une coopérative, par exemple, ou
utiliser un simple label, ce serait tellement plus pratique.. et les
auteurs français pourraient enfin espérer vivre de leur plume.
Ça, c'étaient
les quinze secondes d'utopie gratuite..
___________________________________
N. ET MERCI pour le poisson pas frais..
Être écrivain,
c'est : 10 % écrire ; 20 % relire et corriger ;
30 % chercher, réfléchir et rêver ; 40 % affronter
des éditeurs (leur expliquer leur travail, leur rappeler leurs
promesses et leurs devoirs, subir l'exercice de leur terreur,
détourner leurs superstitions, se ronger les sangs pour ne pas leur
péter la tronche..)
MÉZIGUE
J'ai donc décidé
d'arrêter d'écrire. Ou plus exactement de publier. Ou plus
exactement de prétendre vivre de mes écrits. Ou plus exactement de
me battre contre des éditeurs incompétents, malhonnêtes, mesquins,
hypocrites, lâches, exploiteurs, méprisants... bref, mafieux ;
ainsi que contre un État malfrat qui crache directement à la gueule
de ses artistes, que ce soit en promulguant la « loi sur les
livres indisponibles » ou encore, en déclarant « c'est
l'éditeur qui fait la littérature » et autres scélératesses
impardonnables.
Bien sûr,
n'étant pas comme ces gens, je vais tenir parole en terminant les
projets en cours (Les Vicariants, La Sagesse des Piliers,
Voyageurs éperdus et la collection Adynata) avec les éditions
Le Peuple de Mü ; pour la bonne raison que c'est la seule
maison d'édition compétente et respectueuse que j'aie rencontrée
jusqu'à présent14.
Toutes les autres m'ont au moins déçu, laissé tomber, mis des
bâtons dans les roues, méprisé, fait chier, manqué de respect,
trahi, trompé, volé, etc. Certaines l'ont fait plus que d'autres,
et deux au moins ont saboté des projets dont j'étais à l'origine.
Toutes ont, à un moment ou un autre, « oublié » leurs
devoirs éditoriaux envers moi.
Je n'ai pas la
moindre intention de me battre contre ce système féodal digne de
l'Ancien régime, celui qui a fini la tête dûment tranchée.
D'abord parce que ses partisans ont pris soin de m'ôter tout moyen
de le faire ; ensuite parce qu'en les combattant, je deviendrais
comme eux.
J'ai démontré
dans les chapitres d'Il était une mauvaise foi les mécanismes
mentaux proprement ineptes, voire démentiels, qui poussent ces
individus à se croire justifiés dans leurs agissements veules et
inconséquents. Ils ont du pouvoir donc ils s'en servent, sans
le moindre discernement. Ne parlons pas d'intelligence, cette notion
ne leur est pas familière ; quant à la sagesse, c'est une
entité extra-terrestre qui n'a aucune place dans l'occupation
d'éditeur. N'oublions jamais qu'il ne s'agit pas d'un métier
(c'est-à-dire un domaine où il est possible d'exceller grâce au
labeur et à l'expérience), c'est un loisir d'élite érigé en
négoce par une poignée de riches roturiers cherchant à se
faire bien voir du pouvoir royal restauré aux alentours des années
1830/50 et qui ont ensuite consolidé leur pouvoir immérité sous un
empereur syphilitique et dégénéré. En clair : de bien
tristes parvenus.
Pourquoi les
4.000 éditeurs francophones qui se partagent 30 % du chiffre
d'affaires global de l'édition ne s'unissent-ils pas contre les 200
qui se gavent des 70 autres % ? Je l'ignore. Peut-être que la
politique du « diviser pour mieux régner » fonctionne
mieux dans ce milieu que dans les autres. La structure inter-clanique
voire endogamique du monde éditorial s'y prête particulièrement.
La métaphore féodale peut s'y filer très loin. A vrai dire, c'est
aussi l'un des derniers milieux (avec les partis politiques racistes)
où l'on utilise le mot « nègre » sans sourciller15.
Les libraires en sont les métayers, qui s'en tirent difficilement (à
condition de plier l'échine) et les auteurs en sont les serfs, dont
la seule liberté consiste à crever la gueule ouverte et surtout
muette.
En quinze ans
dans ce « milieu » suranné, je n'ai donc jamais
rencontré d'éditeur qui fût capable (encore moins désireux) de
respecter un auteur non rentable. Tous les considéraient
comme corvéables à merci.
Exemples
entendus : « Il vaut mieux que tu fasses les corrections
toi-même ; avec la crise, on n'arrive plus à trouver de bonnes
correctrices, de nos jours. »
« Je vous
certifie que le coefficient de foisonnement entre l'anglais et le
français est de 0 % ; si votre traduction a plus de mots
que l'original, c'est qu'elle est mal écrite. Recommencez. »
« Voici la
couverture de votre livre ; c'est l'œuvre d'un dessinateur
certes amateur mais très enthousiaste. Nous déplorons le manque de
délai, qui ne nous a pas permis de vous en proposer plusieurs, mais
nous sommes certains que celle-ci vous apportera entière
satisfaction. Non, ce n'est pas une esquisse ; pourquoi ? »
Ad nauseam.
Le menu fretin
est devenu la manne gratuite et inoffensive bonne à jeter en pâture
au public. Et « le » public est toujours cette vague
entité à cerveau réputé unique que ces éditeurs sont intimement
convaincus de connaître jusque dans ses moindres réactions. Sauf
quand ils se trompent, bien sûr, auquel cas c'est forcément la
faute du public, jamais la leur.
Le plus triste,
c'est qu'ils ont parfois raison. Relativement. Il existe en effet un
certain public prévisible, orientable, manipulable ; aux
goûts prédéterminés, que l'on peut ajuster, comme une machine à
cadrans. A vous de savoir si vous en faites partie ; à vous de
savoir si vous choisissez les livres que vous lisez en toute liberté
de conscience ou si vous ne faites qu'obéir à la loi du marché,
donc à des ordures masquées érigées en saints patrons par des
hordes de publicistes décérébrés.
Depuis les années
1980, la loi du marché littéraire a décidé que les distributeurs
(c'est-à-dire les comptables-magasiniers qui gèrent les stocks de
livres et les mettent dans des cartons) devaient devenir les nouveaux
maîtres de la littérature. Personne n'ayant songé à les arrêter,
ils le sont effectivement devenus. Ils avaient l'argent et la
situation-clé ; ils les ont investis (économiquement et
militairement), les ont fait fructifier à coups de « produits
commerciaux », et sont désormais indéboulonnables, puissants
et inconnus du grand public, lequel continue à baver d'admiration
devant une poignée de brontosaures grabataires, savamment maintenu
dans l'ignorance de leur rôle, de leur influence, de leur malignité.
Les pires de tous
sont ceux qui opèrent sur les deux tableaux, portant deux
casquettes. Car certains éditeurs (qui sont toujours mieux informés
que les autres membres de ce milieu16)
ont su prévoir l'évolution « historique » de la
situation et se sont placés en positions dominantes, à des
postes-clés. Ils règnent maintenant sur la République des Lettres,
qui n'a de républicaine que l'aura de sa réputation cacochyme.
Je suis un
anarchiste qui ne pose pas de bombes. Je suis donc sans arme face aux
pauvres types et aux femmes sinistres qui agissent en toute
connaissance de cause, en parfaite mauvaise foi, sachant pertinemment
que jamais je ne m'abaisserai à leur faire ce qu'ils me font, et
qu'ils font précisément parce qu'ils se savent à l'abri ;
ce qui est la définition même de la lâcheté. Lâcheté qu'ils
appellent leur honneur, ce qui tue dans l'œuf tout espoir de les
révoquer, de les amender, de les convaincre de leur iniquité
fondamentale. Leurs esprits médiocres et limités se réconfortent
mutuellement, délaissant volontiers l'exercice de leur conscience à
celui de l'esprit de clan, celui-là même qui précède tous les
despotismes.
Le public les
laisse faire par ignorance, la Loi les laisse faire par complicité,
les libraires les laissent faire par étouffement et les auteurs les
laissent faire par impuissance ou tout simplement parce que ce
n'est pas leur rôle. Et c'est ainsi que rien ne change au pays
de la "bonne réputation".
Quelques auteurs,
peu nombreux et clairsemés, réussissent à survivre malgré tout ;
malgré le mépris, la haine et la jalousie, malgré la misère
savamment entretenue ; malgré le désert culturel, intellectuel
et spirituel qui grandit autour d'eux et les éloigne de plus en plus
les uns des autres. De moins en moins nombreux (presque tous
enseignants ou journalistes), ils s'abreuvent à la seule source
encore disponible aujourd'hui : celle des autres livres,
c'est-à-dire des livres autres.
Rétamons en
passant l'illusion de communication libre et gratuite qu'est censée
être Internet. D'abord, ce n'est qu'un gouffre sans fond où toute
efficacité se dilue dans la mélasse pixelisée ; ensuite,
comme tous les outils sophistiqués transformés en instruments de
pouvoir, seuls en profitent ceux qui savent s'en servir et appliquent
la même et sempiternelle mentalité d'araignée au centre de sa
toile. Cette "solution" est infime et parcellaire, pour ne
pas dire partiellement infirme.
C'est toujours
dans ses livres que se rencontre un auteur ; encore faut-il
qu'ils réussissent à se faire publier, contre vents et marées,
donc contre bêtise et préjugés, contre omertá et loi du
marché, contre norme et médiocrité ; autant dire rarement et
mal. Et c'est cette vigilance qui est, en fin de compte, aussi
fatigante que le régime de survie imposé à l'écrivain insoumis ;
car elle s'amenuise avec l'âge, le manque de moyens et l'absence
(concertée ou non) de reconnaissance.
De nos jours, la
principale raison pour laquelle quelqu'un achète un livre, c'est
pour l'avoir vu dans un palmarès de meilleures ventes, ce qui
revient à obéir à l'injonction de l'acheter ; preuve
irréfutable que la vigilance intellectuelle est à l'agonie, que le
confort intellectuel règne en maître sur les consciences avachies,
et que la médiocrité et l'innocuité sont devenues les vraies
normes du talent. La preuve : on rencontre régulièrement des
gens intelligents et cultivés qui trouvent que "Houellebecq et
Despentes écrivent vachement bien".
Bien sûr, il
m'arrive de me sentir rasséréné lorsque je croise la route d'un
« vrai » lecteur, qui me communique son plaisir à (me)
lire, mais ces rares rencontres ne se produisent guère que pendant
les derniers « salons où l'on cause », et ceux-ci sont
de moins en moins nombreux, en plus du fait qu'on y croise toujours
les mêmes trombines, celles des « meilleurs-vendeurs »
(pour traduire correctement le terme « best-seller »).
En détruisant la
forme pyramidale du monde des lettres, en le purgeant de ses méthodes
féodales révoltantes, en permettant à un nombre plus important
d'auteurs originaux de vivre décemment... les exploiteurs seraient
enfin remis à leur place, ou encore mieux : remerciés
définitivement et sans le moindre regret ; et les bons éditeurs
se remarqueraient enfin au lieu d'être noyés dans la fosse à purin
savamment entretenue par les plus merdeux d'entre eux.
Mais qui la
détruira, cette pyramide ?
Sur ce, je vous
tire ma révérence.
Post-scriptum :
Les mots qui
précèdent, écrits avant le 7 janvier 2015, sonnent creux,
aujourd'hui. Ils n'ont, en tout cas, pas la résonance qu'ils avaient
pour moi au moment de les écrire. On m'objectera que ma situation
est loin d'être aussi grave que celle de la liberté d'expression de
notre pays désormais renvoyé manu militari aux temps des
guerres de religion.
Au contraire, je
considère que cela participe du même problème, celui de la
possibilité de vivre décemment, librement, pleinement, de, par
et pour ses idées ; c'est-à-dire contre des
imbéciles, des ignares, des salopards et des prêcheurs tarés. Si
les éditeurs médiocres ne sont certes pas des psychopathes qui se
masturbent grâce aux vibrations d'une Kalachnikov, si les critiques
littéraires ne jouissent pas concrètement du sang qui gicle de
plaies ouvertes, si les journalistes complaisants ne font pas la
pluie et le beau temps à l'aide d'une vraie machette, tous sont
pourtant des censeurs et des intrigants, des étrangleurs de souffle
nouveau, des étouffeurs de talents, des marchands de merde
idéologique, des destructeurs d'originalité, des écraseurs
d'idées, des plieurs d'échine, bref des ayatollahs de pacotille qui
distribuent leur fatwa au gré de leurs caprices morveux, et ce sans
la moindre opposition véritable. Ils
restent en place parce qu'ils savent que la seule arme que leurs
adversaires auront la décence d'utiliser contre eux, ce sont les
mots ; précisément ces mots que les gens comme moi ne peuvent
plus rendre publics sans risquer d'en crever – que ce soit de
misère, de mépris ou de barbarie.
______________
O. Bibliographie
Normand
BAILLARGEON : Petit cours d'auto-défense intellectuelle
(Lux, 2006)
Olivier
BESSARD-BANQUY : L'industrie des lettres (Agora-Pocket,
2009)
Henri-Frédéric
BLANC : Nuit gravement au salut (Actes Sud, 1998)
Belinda CANNONE :
Le sentiment d'imposture (Folio essais, 2005)
Thierry
DISCEPOLO : La trahison des éditeurs (Agone, 2011)
Isabelle DIU &
Elisabeth PARINET : Histoire des auteurs (Perrin, 2013)
Axel HONNETH :
La société du mépris (La Découverte, 2006)
Pierre JOURDE :
La littérature sans estomac (L'esprit des péninsules, 2002)
Claire JULLIARD :
Les scandales littéraires (EJL, 2009)
Bernard LAHIRE:
La condition littéraire (La Découverte, 2006)
Alberto MANGUEL :
Dans la forêt du miroir (Actes Sud, 2003)
Gérard MENDEL :
Une histoire de l'autorité (La Découverte, 2003)
Frédéric
ROUVILLOIS : Histoire des best-sellers (Flammarion, 2010)
____________________________________________________
1
Comme tout le monde, vous me direz ; oui, mais la différence,
c'est que lui, il l'annonce d'emblée. Appelez ça une forme de
sincérité désarmante, si ça vous chante.
2
Non pas qu'il soit docteur, mais afin de rendre hommage à un
personnage du film Les 5000 doigts du Dr T., auquel il
ressemble par ses aspects les plus repoussants (encore que celui du
film soit bien meilleur chanteur et danseur).
3
C'est typiquement le genre d'excités auquel Patrick Dewaere
pourrait dire, en le regardant dans les narines : "Putain,
toi, tu devrais fermer ta gueule plus souvent ; ça nous ferait
des vacances !"
4
Et vous voilà obligés de vérifier la définition du mot
"dithyrambique" dans le dico !
5
Curieusement, il ne mentionne pas la quatrième personne présente.
Pour protéger qui ? Ou pour lui signifier qu'elle n'a aucune
importance ?
6
Quelques jours après cette rencontre hystérique, j'ai croisé un
représentant de ce nouveau lectorat rampant ; quelqu'un qui
estime que la langue doit évoluer en se gavant d'anglicismes
débiles, qui ne voit pas où est le problème, qui hausse les
épaules et lève les yeux au ciel quand on tente de lui faire
comprendre que son cerveau est autant parasité que son estomac.
Bref : un parfait petit soldat de la néo-Kultur.
7
Quand il téléphone, il commence par "Allô ? C'est...
euh... C'est T." Ah, ouais ? Dans ce cas, je suis Marc
Dorcel en tongs dans ta cave !
8
Lequel est partagé (c'est-à-dire déchiré) entre le groupe
Arnault, la Société générale, le Crédit agricole et
l'investisseur états-unien Colony Blue, qui fait dans les casinos à
Las Vegas et est donc l'héritier des mafieux de Chicago et de Los
Angeles.. Quand je vous disais que Scorsese n'était pas loin !
Entre parenthèses, le fait que Carrefour soit constamment en
déséquilibre du fait de ses dissensions internes veut dire que
tout projet financé par le Dr T. peut capoter faute de crédits
à n'importe quel moment. Va t'investir dans ce panier de requins,
mon frère !
9
Petit barème temporel (pour bien comprendre le langage des
éditeurs) : quand un éditeur vous dit demain, cela veut dire
la semaine prochaine ; la semaine prochaine veut dire le mois
prochain ; le mois prochain veut dire l'année prochaine ;
et l'an prochain veut dire... jamais. (Et "je n'ai pas reçu
ton e-mail" veut dire "je l'ai mis à la corbeille par
erreur et je n'assume pas").
10Dernière
communication de sa part : "Mes chiens ont bouffé les
câbles Internet."
11
Lorsque Jedediah Leland (Joseph Cotten), écœuré
par la trahison de son ami Charles Kane (Orson Welles), refuse de
faire l'éloge de l'épouse de ce dernier, respectant ainsi la
profession de foi qu'ils avaient rédigée ensemble lors de la
reprise du journal.
12
N'oublions pas que la moitié des "démocraties"
européennes sont des monarchies déguisées.
13
Singeant celle des entreprises néo-libérales, telles qu'elles sont
décrites dans le documentaire The Corporation,
qui démontre que l'économie mondiale repose sur des entités
inhumaines (au deux sens du terme).
14
Raté. Le 31 décembre 2016, j'ai mis fin à ma "collaboration"
avec cette maison devenue comme les autres. Seul le projet
Vicariants continue, parce que c'est un collectif et qu'il
n'est pas terminé, puisque l'éditeur a pris un an et demi de
retard sur sa confection. J'ai aussi récupéré l'ensemble de mes
droits sur toutes mes publications, sans autre forme de procès. Y
aurait beau voir..
15
Même s'il est de plus en plus remplacé par "ghost writer",
ce qui fait évidemment moins raciste. Mais ce n'est qu'un snobisme
à la place d'un autre.
16
Je n'ai jamais découvert comment on obtient les droits
d'exploitation d'une traduction ; ceux-ci s'achètent aux
enchères, mais à qui ? Comment ? Où ? Mystère
savamment entretenu, puisque même certains éditeurs (petits, donc
pas dangereux) l'ignorent.
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