SherWat N° 19 :
Le venin de l'autre
Sherlock HOLMES:
Watson! Suis blessé. Mordu par veuve noire. Ne dois pas bouger.
Docteur WATSON:
Juste ciel! Ce n'est pas une de vos plaisanteries, j'espère? Où
êtes-vous?
Sherlock HOLMES:
Guichet des retraits, gare de Paddington. La bête était dans un
colis.
Docteur WATSON:
J'arrive le plus vite possible; je suis à deux pas. Quelle chance!
Sherlock HOLMES:
Soyez prudent. Suis sûr qu'assassin toujours à proximité. Pour
jouir de ma souffrance.
Docteur WATSON:
J'ai une ampoule de sérum dans ma trousse. Mais cessez de vous
agiter. Suis en route.
Sherlock HOLMES:
Ai amélioré mon twittographe; ne faut plus qu'un doigt pour s'en
servir. Le pouce gauche.
Docteur WATSON:
J'y suis, mais le bureau est fermé à double tour. Comment vous
atteindre?
Sherlock HOLMES:
Dedans. Enfermé. Pas méfié. Pourtant, nom de l'expéditeur: Mary
Trio.
Docteur WATSON:
Qui? Oh, une autre anagramme de Moriarty. Bon, je vais enfoncer la
porte.
Sherlock HOLMES:
Non! Peut-être piégée. Idiot! Idiot! Moi, idiot! Même vous
n'auriez pas ouvert ce colis.
Docteur WATSON:
Ne vous emportez pas; c'était peut-être idiot mais il est trop tard
pour regretter. Je ne sais pas si n–
Sherlock HOLMES:
Une détonation! Était-ce un coup de feu? On vous tire dessus?
Watson, êtes-vous indemne?
Docteur WATSON:
Vais bien. Poursuis le tireur.
Sherlock HOLMES:
Attrapez-le, John. Que je meure... Conscience apaisée.
Docteur WATSON:
Je suis fou: j'allais vous abandonner. Je reviens; je briserai la
fenêtre.
Sherlock HOLMES:
– – – Watson? Je... je ne suis donc pas mort? Où êtes-vous?
Il fait noir comme dans un four.
Docteur WATSON:
Je vous ai injecté le sérum; vous étiez inconscient. L'ambulance
va arriver. Je poursuis l'assassin.
Sherlock HOLMES:
Moriarty? Il va vous écorcher vif. Pourquoi n'êtes-vous pas resté
ici?
Docteur WATSON:
J'ai dû choisir entre lui et vous. La piste est froide, maintenant.
Mais je l'aurai.
Sherlock HOLMES:
Il est trop tard. Vous auriez dû l'attraper et me laisser mourir.
Docteur WATSON:
Ne dites pas de bêtise. Il vaudrait mieux découvrir pourquoi il
vous hait à ce point.
Sherlock HOLMES:
Un tel poison a dû lui ronger les intérieurs. Mais je ne connais
pas cet homme, bons sang! J'en conclus qu–
Docteur WATSON:
Quoi donc, Holmes? Avons-nous été coupés, ou bien avez-vous
interrompu volontairement votre message?
Sherlock HOLMES:
Tout me porte à croire qu'il n'est qu'un commanditaire. C'est ce que
je voulais dire.
Docteur WATSON:
Un commanditaire? Pour qui diable travaillerait-il? A part le diable,
justement.
Sherlock HOLMES:
Un consortium de criminels? Un ennemi d'enfance? Une erreur de
distribution? A qui profiterait mon trépas?
Docteur WATSON:
Je n'ai pas assez d'éléments pour trancher. Dois vous laisser;
tiens peut-être une piste. Remettez-vous.
Sherlock HOLMES:
J'entends la cloche de l'ambulance. J'ai si sommeil que vous avez dû
m'administrer un sédatif. Watson? Wat–?
SherWat N° 20 :
Un petit cercle ennemi
Docteur WATSON:
Holmes, je tiens la piste de Moriarty. Il est descendu au Savoy sous
le nom de Tim Arroy. Rejoignez-moi–
Sherlock HOLMES:
Laissez tomber Moriarty, Watson. Ce n'est pas lui qui m'intéresse.
Docteur WATSON:
Je ne comprends pas. C'est un criminel notoire; nous en sommes sûrs,
désormais. Il faut l'arrêter.
Sherlock HOLMES:
Certes, cela ne fait aucun doute. Lestrade s'en occupera. Je veux le
cerveau qui lui donne ses instructions.
Docteur WATSON:
Dans ce cas, ne serait-il pas logique et indiqué de le trouver grâce
à Moriarty.
Sherlock HOLMES:
C'est précisément ce qu'il espère. C'est pourquoi nous devons
l'attraper autrement.
Docteur WATSON:
Euh... Admettons. Comment comptez-vous vous y prendre? Nous ne savons
rien de lui.
Sherlock HOLMES:
Ou d'elle. Nous savons qu'il me hait mais qu'une force obscure
l'emêche de me tuer tout à fait.
Docteur WATSON:
Ah, bon? J'y suis: vous avez encore lu un livre du Dr Freud. En quoi
cela nous aidera-t-il?
Sherlock HOLMES:
Je pense que c'est un proche; quelqu'un qui nous connaît intimement.
Docteur WATSON:
Mais vous n'avez quasiment plus de famille! Quant à la mienne, elle
est si éloignée...
Sherlock HOLMES:
Non, pas un membre de nos familles. C'est quelqu'un d'aisé, capable
de payer des criminels de rang moyen.
Docteur WATSON:
Je ne vois vraiment personne qui corresponde à ce caractère. A
moins que... votre gouvernante?
Sherlock HOLMES:
Ne soyez pas ridicule. Comment s'appelait l'écrivain qui voulait que
nous retrouvions le spectre sa mère?
Docteur WATSON:
M. Doyle? Ce n'est pas un intime; nous ne l'avons vu qu'une fois.
Pourquoi pensez-vous à lui?
Sherlock HOLMES:
Lui nous connaissait, par vos récits. Rappelez-vous ses dernières
paroles: "Je ne vous oublierai jamais..."
Docteur WATSON:
"...et serai désormais votre ange-gardien." Vous n'aviez
pas voulu d'argent. Pensez-vous qu'il est fou?
Sherlock HOLMES:
Qui peut savoir ce qui se passe dans une cervelle humaine? Plus j'y
songe, plus je me dis que c'est lui.
Docteur WATSON:
C'est terrible. Ce serait un adversaire redoutable. Il était très
cultivé et très intelligent.
Sherlock HOLMES:
Oui, presque autant que moi, oui. Je ne vois personne d'autre. Nous
allons donc lui tendre un piège.
Docteur WATSON:
Un piège? Que puis-je faire pour vous aider? Je vous écoute.
Sherlock HOLMES:
Vous allez vous grimer afin de lui ressembler le plus possible. De
mon côté, je vais faire le nécessaire.
Docteur WATSON:
Je n'aime pas votre plan. Aller chez Doyle le confronter est risqué,
surtout s'il est notre ennemi.
Sherlock HOLMES:
Je sais ce que je fais. Ayez confiance. Sonnez chez lui dès je vous
aurai twittographié.
Docteur WATSON:
Je le ferai. Mais je prends une arme tout de même. A plus tard.
à suivre...
SherWat N° 21 :
Sous le masque et la plume
Sherlock HOLMES:
Maintenant, Watson! Entrez sans frapper.
Docteur WATSON:
Bonté divine! Que lui avez-vous fait? Il s'étouffe! Il est en train
de mourir.
Sherlock HOLMES:
Je ne pensais pas que mon idée serait aussi radicale. Je crains
qu'il ne soit mort de peur en vous voyant.
Docteur WATSON:
Par tous les diables! Que lui avez-vous dit pour qu'il fût terrorisé
à ce point?
Sherlock HOLMES:
Je l'ai convaincu qu'il était un imposteur et que vous étiez le
vrai Conan Doyle.
Docteur WATSON:
C'est de la démence! Et si vous vous êtes trompé? Vous avez
peut-être tué un innocent.
Sherlock HOLMES:
NOUS l'avons tué; vous êtes complice. Sans votre apparition, il
n'aurait pas mordu à l'hameçon.
Docteur WATSON:
Je... Quoi? Encore une de vos plaisanteries?
Sherlock HOLMES:
Non. Je crains que ce ne soit là une forme inédite d'homicide
involontaire. Nous devons nous dénoncer.
Docteur WATSON:
Jamais de la vie! Ne bougez pas d'ici ou je vous brûle la cervelle!
Sherlock HOLMES:
Qu'est-ce qui vous prend? Vous comptez échapper à la justice?
Docteur WATSON:
Je vous interdis de parler de cette affaire à quiconque. Laissez
Doyle, on croira à une crise cardiaque.
Sherlock HOLMES:
Watson, je sais que c'est dur à admettre mais nous devons obéir à
notre conscience morale.
Docteur WATSON:
Pas question! Nous allons continuer comme avant. Sans rien changer.
Sherlock HOLMES:
Vous ne seriez pas en train d'essayer de me faire chanter, par le
plus garnd des hasards?
Docteur WATSON:
Nos mains sont mutuellement liées. Partons simplement et reprenons
nos avantures.
Sherlock HOLMES:
Comme si de rien n'était? Il me faudra une raison impérieuse pour
accepter cela.
Docteur WATSON:
Je vous la donne: ce n'était pas M. Doyle votre ennemi intime. Vous
avez tué un innocent.
Sherlock HOLMES:
Ah non? Qu'est-ce qui vous rend si sûr de vous, pour une f–
Docteur WATSON:
Ne vous arrêtez pas en chemin. Quand l'impossible a été éliminé,
ce qui reste, aussi invraisemblable qu–
Sherlock HOLMES:
Vous! C'est vous, Watson, qui avez commandité tous ces crimes?
Docteur WATSON:
Vous n'imaginiez tout de même pas que les gens allaient venir
spontanément? Il fallait les appâter.
Sherlock HOLMES:
Mais pourquoi? Pourquoi toutes ces machinations horribles et
tortueuses?
Docteur WATSON:
Pour bien des raisons. La principale: fournir le matériau de mes
histoires.
Sherlock HOLMES:
Qui commencent à rapporter, si j'ai bien compris. A vous, pas à
moi. Ensuite?
Docteur WATSON:
Parce que vous êtes incapables de faire quoi que ce soit seul. Vous
êtes d'une immaturité exaspérante!
Sherlock HOLMES:
Vous savez bien que je suis trop... en avance sur le monde extérieur,
et que celui-ci–
Docteur WATSON:
Le bel argument! A ce stade, ce n'est plus de l'orgueil, c'est... Le
mot n'existe même pas.
Sherlock HOLMES:
Dans ce cas, vous aurez du mal à écrire cet épisode pour le moins
déplorable, et sans doute ultime.
Docteur WATSON:
Ultime? Oh non! J'ai besoin d'argent pour rembourser mes dettes; et
l'armée m'a refusé une pension.
Sherlock HOLMES:
Pour quelle raison, si je puis me permettre? Lâcheté au combat?
Docteur WATSON:
Doutes sur ma loyauté. En Crimée, j'ai eu une maîtresse russe. Peu
importe! Nous allons continuer.
Sherlock HOLMES:
Mais enfin, ce ne sera pas du tout la même chose, si je sais que
vous êtes derrière tout ce qui m'arrive.
Docteur WATSON:
Vous n'avez rien compris. Je n'ai ordonné que certains des premiers
crimes. Pour attirer le chaland.
Sherlock HOLMES:
Et maintenant que ma réputation est forgée, la clientèle suit?
N'attendez pas que je vous en remercie.
Docteur WATSON:
Vous ne m'avez jamais remercié. Et vous n'aurez pas à cesser vos
sarcasmes envers moi; le public adore.
Sherlock HOLMES:
Franchement, Watson, je ne sais pas du tout si cette "association"
pourra fonctionner longtemps.
Docteur WATSON:
Peu m'importe. C'est tout ce que j'ai trouvé pour payer ma retraite.
Je ne veux pas mourir miséreux.
Sherlock HOLMES:
Nous rentrons chez nous, tout simplement? Et M. Doyle? Vous ne
comptez pas prendre sa place, tout de même?
Docteur WATSON:
J'y avais songé. Mais ce serait trop contraignant pour sa famille et
pour mon emploi du temps.
Sherlock HOLMES:
Et vous êtes loin d'être aussi intelligent; cela se remarquerait.
Docteur WATSON:
Je vous ai eu! Ayez l'honnêteté de le reconnaître. Votre
infériorité a été prouvée. Mathématiquement.
Sherlock HOLMES:
Calmez-vous, Watson. Tout ce qu'il vous plaira. Après vous?
Docteur WATSON:
Passez devant; je ne suis pas fou.
Sherlock HOLMES:
Si vous le dites. En tout cas, vous voyez: je reste encore et
toujours le premier.
— — —
A.C. DOYLE: M.
Holmes, votre plan a fonctionné comme prévu; je suis sorti de
catatonie une heure après votre départ.
Sherlock HOLMES:
Parfait. C'était nécessaire pour tromper le bon docteur. Suis
impatient de découvrir sa prochaine intrigue.
A.C. DOYLE: Ravi
d'avoir pu vous être utile. Serai toujours partant pour de nouvelles
aventures.
FIN
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire