Sherlock
HOLMES : Watson, connaissez-vous un moyen radical de faire fléchir
un éditeur anglais?
Docteur
WATSON : Vous, Holmes, me poser une question? C'est le monde à
l'envers. Seriez-vous souffrant?
Sherlock
HOLMES : Pas de sarcasmes, par pitié! Répondez: sauriez-vous
convaincre un éditeur?
Docteur
WATSON : Tout dépend de quoi. Avec de l'argent à la clé, cela ne
présentera la moindre difficulté.
Sherlock
HOLMES : Vous savez bien que je n'en ai pas et que ce procédé est
en deçà de mes valeurs. Il est question d'honneur.
Docteur
WATSON : Alors, cela dépend de l'honneur de qui. Serez-vous plus
royaliste que notre reine insubmersible?
Sherlock
HOLMES : Oh, la fine mouche. Il est bien question de reine mais pas
la "nôtre", celle de Suède: Christine.
Docteur
WATSON : C'est noble de votre part mais elle est morte il y a deux
siècles. Quel rapport avec un éditeur actuel?
Sherlock
HOLMES : L'un d'eux va publier la correspondance "amoureuse"
de la reine avec un cardinal de l'époque, Azzolino.
Docteur
WATSON : "Un" cardinal? Je la croyais portée sur les
femmes. A quoi bon s'inquiéter d'un scandale de plus?
Sherlock
HOLMES : Ma commanditaire veut l'éviter. A Rome, on parle d'une
organisation de femmes déguisées en cardinaux.
Docteur
WATSON : Par Jupiter, quelle plaisanterie douteuse! Sur quoi cette
rumeur est-elle fondée?
Sherlock
HOLMES : Je la tiens de ma commanditaire, Antonia Carelberg, plus
connue en tant que cardinal Antonio Patafiollo.
Docteur
WATSON : 1/ Je n'y crois pas. 2/ Pourquoi voudriez-vous empêcher la
papauté de s'effondrer sous le ridicule?
Sherlock HOLMES
1/ Allez à Canterbury vous confesser et glissez une main sous la
robe de l'évêque; vous serez surpris.
Sherlock
HOLMES : 2/ Le ridicule n'a, hélas, jamais tué personne. Le papisme
durera ce que durent les empires.
Sherlock
HOLMES : 3/ Je dois donner le change à ma commanditaire pour
encaisser mon dû. Voilà!
Docteur
WATSON : Votre assiduité pour cette femme m'intrigue. A combien se
monte votre "dû", si je puis permettre?
Sherlock
HOLMES : Vous ne devriez pas: Mlle Carelberg est aussi belle que
libertine. Et je ne suis plus de marbre.
Docteur
WATSON : Vous, Holmes? Céder aux plaisirs de la chair tendre et
frémissante? De la pâmoison incontrôlée? De la–
Sherlock
HOLMES : Vade retro, Sarcasmus! Allez-vous enfin me dire comment
convaincre l'éditeur de surseoir à son projet?
Docteur
WATSON : 1/ Le persuader que la correspondance est un faux
l'alléchera davantage; ce n'est donc pas la solution.
Docteur
WATSON : 2/ Le menacer est inutile; les éditeurs n'ont pas assez de
sens commun pour éprouver la peur.
Docteur
WATSON : 3/ Ergo: volez les épreuves chez l'imprimeur,
le manuscrit chez l'éditeur, et original chez l'auteur.
Sherlock
HOLMES : Bravo, Watson! Vous voyez bien que vous pouvez être de bon
conseil quand vous y mettez du vôtre.
Docteur
WATSON : Vous êtes vexant même en faisant des compliments. Un
conseil pour recevoir l'hommage de la Carelberg?
Sherlock
HOLMES : Je sais me servir d'un condom! J'ai toujours le mien depuis
l'université. Dans quel tiroir l'ai-je fourré?
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