Compte
rendu de la journée d'information
sur
le livre numérique du 28 mars 2012
(Nîmes,
carré d'art)
A
cause d'un rendez-vous administratif matinal1,
j'arrive en retard, vers 10h45. L'intervention des deux membres de la
SGDL, prévue à 11 heures, est pourtant déjà entamée !
Ils sont en train de rendre compte de l'action de concertation de
leur organisme, notamment en matière de négociations des droits
entre auteurs et éditeurs (lesquels seront désormais appelés ici
les A et les É).
Tout
d'abord, on procède à un rappel général de ce qu'est un contrat à
compte d'É (le contrat à compte d'A est écarté d'emblée ;
il n'est pas considéré comme "professionnel"). On nous
explique que si un A a payé quoi que ce soit à un É, ne serait-ce
que des exemplaires de son livre, le contrat est tacitement considéré
comme à compte d'A (c'est-à-dire relevant de l'article 132-2 du
Code de la Propriété intellectuelle). Néanmoins, si vous avez
signé sans savoir à quoi vous vous exposiez, vous ne pourrez pas le
faire résilier pour cette seule raison2.
Comme tous les autres principes de défense qui seront évoqués au
cours de la journée, il apparaît clairement que les É traitent les
A comme des consommateurs exploitables et estiment en bloc que
Caveat emptor, et après eux le déluge.
Un
A a deux sortes de droits : moraux et patrimoniaux. Les premiers
sont inaliénables (c'est-à-dire qu'on ne peut pas vous les ôter et
vous ne pouvez ni les vendre ni les louer ni même les prêter ;
ça a l'air absurde mais ça va mieux en le disant ; avoir des
droits moraux signifie que si votre livre crée une polémique, c'est
vous qui en subirez les conséquences morales, pas l'É3).
Les seconds, qui concernent les droits d'exploitation, de
reproduction et de représentation, sont cessibles, et c'est pourquoi
les contrats sont appelés des Cessions de droits. A partir du moment
où l'A a signé, il ne possède plus les droits de reproduire
librement son œuvre et de la promouvoir (ni de la vendre), et ce
pour la durée de la cession, qui est (par défaut) indéfinie,
c'est-à-dire qu'elle se termine 70 ans après la mort de l'A4.
Il
est possible (mais très mal vu5)
de demander une durée limitée lors de la négociation du contrat.
Toutefois, étant donné les changements d'usages que va entraîner
la "révolution numérique", il pourrait devenir courant
d'intégrer au moins une clause dite de "rendez-vous" ou de
"réexamen" dans les contrats, qui permet de fixer une date
(dans deux, trois, cinq ou dix ans au choix) à laquelle les termes
du contrat seraient tacitement renégociés (ou pas, ce qui
entraînerait logiquement sa rupture de facto ;
mais le cas ne s'est encore jamais présenté pour une œuvre
numérique).
En
passant, les intervenants de la SDGL rappellent (mais ce n'est pas
superflu) qu'être É en France n'est pas un statut défini par la
loi ; le simple fait de signer un contrat à compte d'É crée
automatiquement cette "occupation", qui peut donc être
temporaire aussi bien que permanente, sporadique, voire unique. De
même, l'A n'est pas non plus un statut défini par la loi mais
constaté par sa signature au bas d'un contrat. On nous prévient
alors d'un "piège" classique : ce n'est pas parce que
votre É verse vos cotisations sociales à l'Agessa que vous y êtes
affilié/e ! L'affiliation est un acte volontaire, qui
devient même obligatoire si vos revenus en droits d'auteur sur une
année donnée dépassent un certain seuil (environ 8.000 €).
Autrement dit, si vous n'y prenez pas garde, vous pouvez passer la
moitié de votre vie à croire que vous avez cotisé pour votre
retraite, et vous retrouver le jour dit avec... les yeux pour
pleurer. Renseignez-vous tout de suite auprès de cet organisme.
Un
récapitulatif des obligations des deux parties est ensuite présenté.
L'A en a deux : fournir le manuscrit, ou le fichier informatique
précisé par l'É6 ;
et garantir l'É contre toute revendication possible7.
L'É
a cinq obligations majeures :
-
fabriquer l'ouvrage ; on aborde là un point délicat du
livre numérique, puisque cette obligation disparaît de fait ;
nous en reparlerons...
-
assurer sa promotion permanente et suivie ; j'apprends
ici, stupéfié, que cette notion n'est pas définie par le CPI, ce
qui a pour conséquence qu'aucun É n'a jamais été condamné ni
même inquiété pour n'avoir pas accompli son travail de
représentation, puisqu'on n'a jamais pu prouver que celui-ci n'avait
pas été effectué ; si donc votre ouvrage n'est pas distribué
en librairie, si aucun article n'a paru où que ce soit, vous n'aurez
aucun recours légal contre votre É ; il est protégé par le
vide de la loi. Quant au numérique, cette question épineuse sera
abordée un peu plus loin ;
-
rémunérer l'A à proportion des ventes à prix public ;
il faut signaler que tout autre moyen de paiement est considéré
comme illégal, sauf s'il a été précisé dans les termes du
contrat8 ;
-
rendre des comptes au moins une fois par an ; la loi
prescrit que ces rapports doivent être transparents et
compréhensibles, ce qui est loin d'être toujours le cas ; un A
pris de doutes peut légalement exiger les documents qui ont permis à
l'É d'établir sa reddition ; hélas, rien ne garantit que les
chiffres cités sont exacts ; aucune procédure d'enquête n'est
prévue en l'occurrence et rien ne permet à un A de vérifier que
les chiffres indiqués correspondent à la réalité ; tout est
donc affaire de confiance ; c'est-à-dire que l'A doit faire
confiance aveuglément à l'É (qui a même le droit de se
tromper) ; enfin, là encore, l'absence de reddition des comptes
n'a jamais permis à un A de faire résilier un contrat.
L'É
a le droit de regrouper les divers ouvrages d'un même A et de
pratiquer une compensation des titres entre eux ; ce n'est donc
pas parce que l'un de vos livres marche soudain que vous gagnerez
(enfin) de l'argent ; l'É pourra parfaitement en profiter pour
combler votre compte précédemment négatif. Cette pratique n'a
jamais été condamnée mais vous pouvez exiger une reddition des
comptes séparés par titres9.
A
signaler que dans certains pays, un système dit de book-tracking
(pistage des livres) a été mis en place et permet de suivre en
temps quasi réel les mouvements commerciaux des ouvrages ; il
permet de se passer de reddition des comptes et évite à tout le
monde de se fâcher pour des broutilles. Comme il fallait s'y
attendre, la France n'envisage pas dans l'immédiat d'adopter ce
système ; on sait ce que cela veut dire.
-
respecter le droit moral de l'A10.
Enfin,
les intervenants rappellent qu'il y a une prescription de cinq (5)
ans à compter de la signature du contrat pour réclamer des droits
(ou toute autre rémunération) qui n'auraient pas été versés.
Cinq ans ; pas un jour de plus.
Ce
récapitulatif terminé, nous passons à l'aspect numérique de la
question. Qu'en sera-t-il à l'avenir des ouvrages destinés à la
diffusion électronique ?
Le
4 mars 2011, une série de négociations menées entre le Syndicat
national de l'édition (SNE) et le Conseil permanent des écrivains
(CPE) sur les conditions de cession et d'exploitation des droits
numériques sont arrivées à leur terme. Elles portaient
essentiellement sur les six points suivants :
1/
un contrat spécifiquement numérique, séparé du contrat papier11 ;
2/
une durée limitée pour l'exploitation, d'une moyenne de 2 à 3 ans,
avec clause de tacite reconduction pour les deux parties ;
3/
une rémunération proportionnelle aux ventes, ajustée de manière à
correspondre à un équivalent absolu des ventes concrètes12 ;
4/
une définition légale de l'exploitation permanente et suivie,
intégrée au CPI ;
5/
un Bon à Diffuser numérique, visé par l'A avant la mise en ligne
du projet ;
6/
une reddition des comptes plus fréquente et plus fiable, où la
compensation par l'É ne serait pas permise.
Les
quelques "acquis" obtenus sont les suivants13 :
-
certains É accepteront à l'avenir de regrouper sur le
contrat les articles concernant les droits d'exploitation numérique,
afin que lesdites clauses soient plus visibles ; chaque clause
devra être contresignée par l'A en marge du contrat ;
toutefois, il est conseillé de bien penser à chercher une clause
générale qui annulerait les dispositions des clauses numériques
(auquel cas, le contrat est piégé) ; dans la majorité des
cas, les É ne sont pas prêts à pratiquer les contrats séparés ;
-
les É ne sont pas désireux de mettre en pratique la clause de
rendez-vous14 ;
le CPE a proposé qu'en cas de litige sur le mode de paiement des
œuvres numériques, les A aient recours à une instance de
conciliation, qui émettrait alors un avis (lequel ne pourrait servir
que de consultation auprès d'un juge, ce qui n'empêcherait pas le
litige) ;
-
les É ont refusé d'ajuster le pourcentage sur le prix de vente
numérique, se contentant de garantir qu'il ne descendrait pas en
dessous du pourcentage défini pour la version papier ; les A
s'estimant lésés pourront toujours tenter de se référer à
l'article 132-5 du CPI qui argue d'un "principe de rémunération
juste et équitable" ; le terrain reste vierge à ce jour ;
-
l'exploitation permanente et suivie a enfin été définie en termes
juridiques ; son défaut entraîne la possibilité de mettre l'É
en demeure de faire son travail (mais pas avant deux ans suivant la
signature du contrat) dans les trois mois suivant la mise en
demeure ; la définition sera intégrée au CPI (dès que sa
rédaction en sera terminée)15 ;
-
la pratique du Bon à Diffuser (équivalent du Bon à Tirer de la
version papier) semble avoir été acceptée par les É numériques,
qui devront donc fournir à l'A une version informatique de l'ouvrage
qui devra être impérativement validée avant sa mise en ligne16 ;
cette version sera considérée comme définitive et ne pourra plus
être modifiée sans l'accord exprès de l'A ;
-
rien n'a été conclu sur la reddition des comptes, qui restera donc
souvent ce qu'elle est : floue, invérifiable, sibylline ;
-
il semblerait qu'une clause ait été envisagée pour permettre la
révision des clauses économiques si la "situation économique
générale du marché" venait à changer ; mais ce point a
été abordé rapidement et je n'ai pu poser de question à ce sujet.
En
conclusion, six mois de discussion n'ont abouti qu'à deux points
positifs : l'intégration au CPI de la définition de
l'exploitation permanente et suivie, et la distinction des contrats
numérique et papier (encore que celle-ci ne soit pas adoptée
universellement). Pour le reste, la lutte continue17.
Ensuite
a été abordée la question sur la Loi concernant les livres dits
indisponibles (comme on le sait, adoptée le 22 février dernier à
l'unanimité de nos chers députés). Je renvoie pour toute question
à la plaquette disponible sur le site de la SGDL. Elle est très
claire et fort bien faite. A mes yeux, son point le plus important
est la phrase : "le dispositif obéit à des fins d'intérêt
général" ; et l'on sait parfaitement où passent les
intérêts particuliers dans ces cas-là.
Bon
courage, donc, à ceux qui tenteront de faire valoir leurs droits sur
des ouvrages dits indisponibles et publiés avant le 1er janvier
2001. La seule bonne nouvelle est qu'un A peut exiger18
de sortir du dispositif « s'il juge que l'exploitation
[de son œuvre] porte atteinte à son honneur ou à sa réputation ».
En d'autres termes, il n'aura pas besoin de justifier son choix ni
d'aller en justice. C'est toujours ça de gagné !
La
conférence se termine à 13h10 au lieu de midi ; c'est la pause
et on reprend à 14h30. La fin de la journée se déroule alors dans
une ambiance moins dense mais, pour tout dire, moins passionnante.
Deux É d'ouvrages graphiques viennent nous présenter un logiciel
tout frais : ebook-publisher ; co-financé par la
région Languedoc-Roussillon et le collectif ebook-lr19,
il a été mis au point pour le dernier Salon du livre et permet de
"scénariser des œuvres" (graphiques ou non). C'est-à-dire
qu'à partir de simples fichiers pdf (ou jpeg, ou png, etc.), une
interface d'usage facile20
permet d'élaborer une sorte de mise en temps et en espace du texte
et des images (ainsi que de la musique), donnant la possibilité de
forger une infinité de versions pour le même document de base (un
peu comme les DJ peuvent faire x versions des mêmes morceaux
de musique). La grande force de ce logiciel, outre sa souplesse et sa
rapidité d'utilisation, est qu'il permet un "déploiement"21
optimal des fichiers finaux, que ce soit aux formats ePub, Moby, web,
aussi bien en basse qu'en haute définition, et même (le must !)
au format Daisy, destiné aux aveugles.
Son
léger défaut sera révélé à la fin, grâce à une question
(im)pertinente issue du public : la licence d'exploitation
d'ebook-publisher coûte 2500 € !22
On
passe ensuite, sans pause ni transition, à un exposé général des
éditeurs numériques déjà existants (les e-distributeurs ne seront
pas abordés par manque de temps, vu qu'il est déjà 15h45).
Curieusement, l'intervenante commence par évoquer la possibilité de
mettre en place un système B-to-C, c'est-à-dire "Business
to Consumer", qui, en supprimant tous les intermédiaires,
permettrait aux auteurs de vendre directement leurs œuvres à ceux
qui les lisent. Mais elle balaie bien vite l'argument et lance son
PowerPoint écrit trop petit.
Des
tableaux de chiffres sont censés nous montrer que tout ne va pas si
mal dans le pas-si-pire des mondes, puisque 440 millions d'ouvrages
ont été vendus en France en 2011, ce qui représente 2,7
milliards € de chiffre d'affaires et une légère augmentation
par rapport à l'an dernier. Rien ne nous permet de savoir comment
sont répartis les 440 millions en question. On apprend aussi que le
marché du numérique a décollé puisque 1,45 millions de tablettes
et liseuses ont été vendues en 201123.
Ensuite,
une liste nous "prouve" que les libraires sont toujours ces
gens indispensables qui vendent le plus grand nombre de livres
(23,3%), suivis de peu par les grandes surfaces spécialisées
(22,1%) et les grandes surfaces (19,3%), enfin les "autres",
en vrac, puisqu'ils ne sont pas importants (7% pour les soldeurs,
quand même). Alors que j'écoute d'une oreille fatiguée le
commentaire peu éclairant, je me rappelle soudain que Normand
Baillargeon m'a appris deux ou trois trucs pour me défendre.
J'ajoute mentalement 22,1 à 19,3 et je trouve 41,4 ! Et donc,
j'en conclus que 41,4% des livres en France (c'es-à-dire l'écrasante
majorité) sont vendus dans des supermarchés et qu'on fait
tout pour nous le cacher. Pourquoi ? Parce que ça la fout mal ?
Parce qu'on devrait avoir honte ? Parce que quelqu'un, quelque
part, n'arrive pas à assumer ? Et si c'était la faute des
écrivains, qui se la pètent, et dont il faut ménager la
susceptibilité légendaire ?
Je
m'aperçois alors que je suis crevé, que j'en ai marre d'être là,
à regarder encore un fichu écran géant où quelqu'un qui prétend
défendre mes droits me montre des sites internet plus ou moins bien
foutus24,
où des gens que je ne rencontrerai jamais peuvent acheter mes
bouquins si quelqu'un a pensé à les mettre en ligne avec mon
accord.
Un
peu plus tôt, le monsieur de la SGDL à qui j'avais demandé quand
on pourrait enfin se passer des éditeurs puisque visiblement, on
n'aura bientôt plus besoin d'eux, avait rigolé gentiment en
répondant qu'il ne fallait pas exagérer, qu'ils servent bien à
quelque chose (bien que je n'aie pas compris à quoi) et que "oui,
bon, c'est vrai, en ce moment, ils sont un peu plus durs que
d'habitude parce qu'ils sentent que les choses vont changer, et qu'il
faudra bien que quelqu'un saute dans la grande chaîne du livre".
Pardon ?
"Que quelqu'un saute ?"
Pas
d'affolement ! Nous, les Auteurs, sommes indispensables, pas
vrai ? Le public aura toujours besoin d'histoires, pas vrai ?
Les É ne seront jamais assez inconséquents pour éradiquer les
écrivains vivants et se servir dans la masse quasi infinie des
ouvrages oubliés (pardon, je voulais dire indisponibles) et des
manuscrits refusés ? Pas vrai ?
Plus
tard, en buvant un truc chaud, j'ai repensé à une phrase de Jean
Ziegler, qui se trouve dans son livre L'Empire de la honte :
« H.J. [directeur de la division agriculture chez Nestlé]
estime que ce sont des forces objectives qui, à l'insu de tous,
meuvent les marchés. Les hommes n'y ont aucune part. Il compatit
avec les victimes et voudrait les aider. Sa proposition est
lumineuse : des 25 millions de familles productrices de café
existant aujourd'hui dans le monde, 10 millions au moins "doivent
accepter de disparaître". Il s'agit, on l'aura compris,
d'"assainir" le marché. H.J. conseille la "disparition"
aux hommes et aux femmes excédentaires. Oui, la disparition. »
Finalement,
peut-être que Bradbury s'est trompé ; peut-être que ce ne
sont pas les livres qui vont disparaître, mais les écrivains. Oh,
ils seront toujours là, physiquement, bien sûr. Mais ils parleront
dans le vide, et taperont leurs histoires sur des claviers
d'ordinateurs qu'ils croiront connectés.
1Combiné
à un rhume carabiné ; il faudra me pardonner mes errances.
2En
fin de compte, le seul moyen légal de faire casser un contrat est
de prouver que l'É n'a pas honoré deux (2) commandes effectives et
que le stock n'est pas épuisé.
3Néanmoins,
on nous signale gentiment que dans presque tous les cas où un
procès a été perdu par l'A d'un livre litigieux, c'est l'É qui a
payé les dommages-intérêts.
4Du
moins en Europe ; avec une exception pour les A "morts
pour la France", qui est prolongée de 30 ans.
5L'É,
dans le cas où un A lui ferait une telle demande, ne manquera pas
de se sentir bafoué et le fera savoir (comme cela m'est arrivé
récemment ; j'ai été accusé de "mettre en doute son
honnêteté" ; de là à en déduire que cette dernière
est toute relative...)
6Ceci
va devenir de plus en plus courant ; les É numériques
semblent même désireux d'exiger de plus en plus des A qu'ils
préparent eux-mêmes les documents, y compris en ce qui concerne la
correction et la mise en page ; toujours ça d'économisé,
n'est-ce pas ?
7Mais
on a vu que les É sont heureux de payer les pots cassés par leurs
garnements d'A ; sans doute en vertu du principe que "toute
publicité est bonne à prendre".
8Bien
entendu, la tendance générale des montants offerts aux A est à la
baisse (quand il y en a) ; des 10.000 Francs d'à-valoir + 10%
des ventes qui étaient considérés comme la base d'un contrat
normal avant l'an 2000, on est tombé aujourd'hui à une moyenne de
500 € + 7% (que l'on est prié d'accepter sans rechigner, ou
d'aller voir ailleurs). Il semblerait qu'une proportion notable
d'éditeurs numériques ne proposent même pas d'à-valoir, estimant
que leur offre de 30% sur les ventes est une compensation
suffisante.
9Les
intervenants racontent la "merveilleuse" anecdote de cet É
(non cité, mais important) qui envoya un jour à l'un de ses A une
"reddition des comptes inter-générationnelle" ; en
effet, l'A en question était l'ayant-droit de son père, qui avait
lui aussi été A chez ce même É ; ce dernier avait soudain
eu la "bonne idée" de compenser les comptes du fils avec
ceux du père. Inutile de dire que l'héritier n'avait, cette
année-là, rien touché. Cette affaire a été plaidée et s'est
terminée en faveur de l'A.
10Ouf !
du moment qu'ils ne sont pas obligés de respecter la "personne"
de l'A, on les sent soulagés.
11En
effet - et je suis plutôt étonné que personne ne l'ait
mentionné au cours de cette journée - les gains générés
par les paiements électroniques ne sont pas considérés comme des
droits d'auteur mais comme des revenus commerciaux ; ils ne
rentrent donc pas du tout sous le même régime fiscal et doivent
être pris en compte séparément lors des déclarations. Jusqu'à
présent, tous les É numériques auxquels j'ai eu à faire refusent
de se prononcer sur la question de savoir s'ils envisagent de se
constituer en tant qu'éditeurs au sens classique du terme. Or, nous
avons vu que cette notion ne dépend pas de la loi mais de la
signature d'un contrat. Pour l'instant, aucun "éditeur"
numérique ne m'a jamais proposé de signer le moindre bout de
papier ; mais aucun n'est allé jusqu'au bout des négociations
et malgré quatre tentatives avec autant de prétendus éditeurs
numériques, je n'ai encore rien publié sur le net ; du moins,
pas que je sache. Quoi qu'il en soit, aux yeux de la loi, un e-mail
sur lequel vous donnez votre accord à une collaboration n'est pas
valable ! Un contrat n'est légalement reconnu que sur le
papier, et signé par les deux parties.
12Si
vous touchez 10% sur un livre vendu 20€, cela n'équivaut pas à
10% sur un téléchargement dont le prix est toujours inférieur au
prix du livre papier. Il faut donc, dans tous les cas, réviser ce
pourcentage à la hausse en faveur de l'A.
13Avant
d'aborder les détails, je signale que le CPE (qui est censé
défendre les A) a clairement manifesté son souhait de "ne pas
continuer à discuter indéfiniment", tandis que le SNE estime
que les négociations avec les auteurs ne sont qu'interrompues et
devraient reprendre. Le CPE, ce sont nos collègues auteurs, je le
rappelle ; que ce menu détail vous aide à y voir clair,
petits scarabées !
14Pour
vous dire à quel point les É adorent cette clause, ils l'appellent
entre eux la clause de "revoyure" ; vous savez donc à
quoi vous en tenir.
15Une
proposition a été faite selon laquelle, si l'application n'avait
pas été faite par l'É au bout de six mois, la résiliation du
contrat serait automatique, mais je n'ai pas réussi à comprendre
si cela avait été accepté, refusé ou restait en suspens.
16Personnellement,
sur 5 ouvrages publiés (plus 2 auxquels j'ai collaboré), je n'ai
vu de BàT qu'une seule fois, bien que je les aie tous réclamés.
Et à chaque fois, la réponse a été la même : "Désolé,
on n'a plus le temps ; ça doit partir avant-hier chez
l'imprimeur". L'avantage du numérique, c'est que l'imprimeur
ne pourra plus servir d'alibi ; les paris sont ouverts pour
déterminer qui sera le nouvel alibi favori des Énum :
l'infographiste ? Le webmaster ? La bande passante ?
La foudre ? Le chien qui a bouffé la clé-usb ?
17Pour
faire plaisir à François Bon, je n'ai pas employé le mot
"guerre".
18Dans
les six mois qui suivent la mise en ligne, ce qui implique qu'il en
soit informé ou qu'il s'en rende compte.
19Rassemblement
de quatre É : Benjamin Média, Alter Comics, Le Bonhomme vert, H &
O.
20Deux
fenêtres réglables à volonté, une pour visualiser le
fichier-source, l'autre pour avoir un aperçu du fichier-effets en
temps réel, tel qu'il apparaîtra à l'écran.
21C'est
le terme désormais en vigueur pour désigner l'opération qui
consiste à toucher le plus grand nombre possible de supports :
ordinateurs, tablettes, liseuses, smartphones, planches oui-ja,
iphones, etc. (Cherchez l'intrus).
22Mais
que l'on se rassure, ebook-lr ne compte le vendre qu'à d'autres É !
23Dont
le tiers rien qu'en décembre. On peut donc se poser la question
suivante : si Noël n'était pas une obligation de faire
des cadeaux, combien de ces tablettes n'auraient pas été
achetées ? Autre question : comment savoir ce que les
utilisateurs lisent sur leurs machines ? Combien s'en
servent-ils vraiment ? Etc. Ces questions ne peuvent être
abordées par manque de temps.
24On
a même eu droit à Harlequin. ("Ne vous moquez pas
d'Harlequin", dit la demoiselle en gloussant ; "ils
ont beaucoup fait pour le livre populaire".) Que je sois
fukushimé si j'invente !
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