Un
jour, quand j'avais quatre ans, je faisais des pâtés dans le bac à
sable de la maternelle. J'étais tout seul et je m'amusais bien ;
à vrai dire, j'étais même très fier d'avoir réussi à placer un
pâté parfaitement formé au-dessus de trois autres disposés en
triangle. C'était sans doute ma première construction !
Alors
que je la contemplais en souriant, cherchant quelle annexe lui
ajouter, une ombre me dépassa et, aussitôt, une paire de pieds vint
démolir mon château, sans prononcer un mot. C'était un "grand"
de cinq ou six ans, qui avait franchi la frontière virtuelle
séparant sa cour de la mienne (plus tard, les « autorités »
bâtiraient un vrai mur).
Après
avoir posément piétiné mon ouvrage d'art, il se planta devant moi,
me frappa la poitrine du plat de la main, ce qui me fit tomber, et
proféra une sentence certainement pleine de verve créative. Je
regrette de ne pas l'avoir entendue (ou de ne pas m'en souvenir ;
merci, l'inconscient) car je pense qu'elle a déterminé beaucoup de
choses dans mon existence. Ayant ainsi lâché son verdict morveux,
le futur dictateur de sa propre famille retourna dans sa cour sans
être inquiété par la justice, qui n'avait rien vu, à son
habitude.
C'est
ce jour-là que j'ai commencé à comprendre que certains humains
n'étaient sur terre que dans le but de casser les burnes de leurs
semblables ; même si, techniquement, elles n'étaient pas
encore en place. Plus tard, avec le renouvellement de cette
expérience, je compris que certains individus sont physiquement
incapables de supporter que l'on s'amuse seul pendant qu'eux
s'emmerdent à plusieurs.
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