lundi 8 octobre 2012

Ceci n'est pas une publicité pour bagnole

Publicité authentique, D.R.



Je roulai. Sur une route. Dans une voiture poussive. Une Renault.
Ça sentait bon les vacances. D'ailleurs, la route était celle du Soleil, quelque part entre la Grande-Motte et Palavas-les-Flots ; bref, entre une chaleur à fondre le beurre et le zonzon des moustiques. Il y avait autant de nuages dans le ciel que sous mon crâne. La foule des touristes était puissamment absente. Tout allait bien ; c'était Byzance.

Dans une ligne droite limitée à 110 km/h et où je plafonnais à 90, je fus soudain dépassé en trombe par une Twingo couleur moutarde et cornichons écrasés. J'aurais très bien pu ne pas me soucier de ce qui se passait à l'intérieur de cette voiture ; en fait, j'aurais dû continuer à compter les flamants roses, au risque de m'endormir sous le coup d'une sieste fatale. Mais, comme tous les conducteurs bafoués qui s'ennuient, je voulus voir au moins le profil de l'outrecuidant personnage qui venait de me gifler l'oreille, afin de bien le maudire pendant une poignée de secondes.
Voici ce que j'ai vu : le conducteur de la Twingo tenait son volant de la main gauche, très fermement ; sa tête et son buste étaient tournés vers la droite, où se tenait une passagère. Celle-ci tenait ses bras au-dessus de sa tête et en battait l'air, tentant de parer les coups de poing furibards que lui assenait son voisin. Il hurlait visiblement en bondissant sur son siège pour donner plus de force à ses horions. A chacun d'eux, la voiture faisait une embardée, allant mordre la ligne centrale ou le bas-côté gauche, s'approchant dangereusement de la glissière de sécurité. Ils étaient au bas mot à 150 km/h. Lorsque je les perdis de vue, de longues secondes plus tard, l'homme frappait toujours et la Twingo déblayait la route devant elle.
Au bout d'un moment, je m'aperçus que je ne roulais plus qu'à 60 ; mes jambes faisaient dans le coton industriel. Je me repris peu à peu, en mâchouillant une colère glacée, de celles qui font crisser des dents.
Ce jour-là, je regrettai de ne pas avoir une grosse cylindrée. Je me souviens d'avoir noté le numéro d'immatriculation de la bagnole ; mais je l'ai perdu depuis. Avec le recul, je pense que j'aurais dû passer une annonce dans le canard local, simplement pour décrire ce que j'avais vu.
Je ne l'ai pas fait.

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