lundi 17 novembre 2014

Cela change tout ! ou Naomi Klein contre le Capitalisme

« Dans la lutte de l'organisation révolutionnaire contre la société de classes, les armes ne sont pas autre chose que l'essence des combattants mêmes. » (Guy DEBORD, La société du spectacle, thèse 121).
Les livres de Naomi Klein sont comme l'air et l'eau : indispensables à notre survie. NK n'est pas seulement une journaliste ès économie, ès politique, ès écologie, etc. ; elle a un don pour nous expliquer tout ce qui, dans l'actualité, relève déjà de l'Histoire et s'apprête à nous concerner tous, sans exception. Autrement dit, quand je lis une enquête de NK, je ressens la même impression qu'en lisant un livre de Howard Zinn, pour l'avenir au lieu du passé. Les mots de NK ont une portée signifiante qui dépasse largement le cadre limité (et par qui d'autres que les gros magnats médiatiques ?) de l'édition. On constate avec plaisir (voire jubilation intense) qu'elle n'a de comptes à rendre à personne, ce qui est le meilleur (voire le seul ?) moyen d'écrire en toute liberté, donc de ne pas mentir – y compris à soi-même.

Avec TCE, NK (et son staff de chercheurs), devenue enfin consciente de la réalité du réchauffement climatique et de son impact destructeur sur la Terre, s'attaque à rien moins que l'ensemble des compagnies énergétiques (pétrole, gaz, charbon, nucléaire, etc.) de la planète. Elle conclue logiquement que le plus gros obstacle au sauvetage pur et simple de la Terre, c'est le Capitalisme lui-même et sa mentalité puérile du "C'est à moi, je le veux, je le prends, et quand j'ai fini de m'amuser avec, je le brûle pour que d'autres que moi n'en profitent pas. Na !" Elle vise à détrôner cette vision aussi morveuse qu'erronée qui prend l'acharnement pour de l'opiniâtreté, l'humiliation pour de l'humilité, l'épuisement pour de l'exploitation, le profit pour du progrès, l'intégrisme pour de l'intégrité, etc.
J'ai été étonné de lire que NK faisait partie des gens qui, sans aller jusqu'à réfuter le réchauffement climatique, avaient du moins du mal à y croire. J'aurais cru, au contraire, qu'elle avait accepté et entériné la chose depuis longtemps. C'est donc tout à son honneur de reconnaître qu'elle a eu une sorte de révélation tardive qui l'a poussée au passage à l'acte. Personnellement, aussi loin que remonte ma mémoire, j'ai toujours su que le climat de la Terre allait en se dégradant, et que ceci était le résultat de la pollution issue de l'industrialisation outrancière du monde. Mais il faut dire que je lis de la littérature de science-fiction depuis l'âge de 7 ans, et que cette littérature (bien que réputée non sérieuse par les "penseurs" officiels, c'est-à-dire ceux qui sont payés par les pollueurs) parle essentiellement de l'avenir de l'humanité en général et de celui de la planète en particulier. De là à en conclure que la littérature générale ne sert qu'à noyer le poisson, il n'y a qu'un pas, que je n'hésite pas à franchir : la littérature non spéculative n'est, au mieux, qu'un miroir existentiel qui permet à un certain public soumis de vérifier qu'il a bien un nombril. La belle affaire !
Or donc (s'étant confirmée une fois pour toutes qu'elle avait bien autre chose qu'un nombril), NK, tout au long de 466 pages grand format denses et sans chichis (plus les notes finales), présente de très nombreux exemples d'abominations, de veuleries, de crimes et autres dégueulasseries perpétrés par d'énormes corporations financières, la plupart du temps avec la complicité de gouvernements prétendus démocratiques mais qui prouvent à chacun de leurs actes (surtout de leurs non-actes) qu'ils se moquent éperdument de l'opinion des peuples qui les ont élus par défaut, pour ne pas dire par chantage.
Elle dénonce l'absence d'alternative qui fait des systèmes politiques actuels de lamentables pis-allers scandaleusement obsolètes, irresponsables, aussi méprisants que méprisables. Elle cite maints exemples parfaitement probants de collusions inadmissibles, au point que seuls des individus totalement dénués de la moindre conscience pourraient ne pas être convaincus par ses arguments. Elle pense même à signaler que de tels individus existent bel et bien, et que leur existence va constituer l'essentiel de l'armée ennemie à affronter. Car les experts le disent tous : il reste dix ans pour inverser le processus du réchauffement climatique ; après, il sera trop tard, et l'hiver s'abattra sur la terre pour très longtemps.
Toujours optimiste et pragmatique, NK offre plusieurs exemples d'actions entreprises par des êtres "humains" (au double sens de ce terme) à l'encontre desdites sociétés inhumaines, tous actes aussi courageux que désespérés, souvent voués à l'échec et qui sont autant de combats de David contre les Goliath de l'économie capitaliste se déroulant dans l'ombre et l'ignorance crasse des médias dominés.
Tout cela est bon, nécessaire, vital, revigorant, rassurant ; tout cela nous dit que nous ne sommes pas seuls, que des gens agissent vraiment, qu'on peut "se les faire, ces salauds, si on a les couilles de se battre jusqu'au bout". Elle nous dit clairement, entre autres, qu'il faut être sacrément naïf pour se laisser impressionner par un inepte bouffon du calibre de Richard Branson, par exemple, triste sire dont la seule intelligence réelle sert à gonfler son compte en banque, qui est la vraie mesure de son ego puéril, purulent et putassier (les épithètes sont de moi mais le sens est le même).
NK parvient à faire tout cela sans la moindre surdose de moraline, avec un bon sens éclatant qui fait pièce (et honte) à nombre de philosophes actuels auto-proclamés dont pas un ne lui arrive à la cheville (surtout ouvrière). Il serait d'ailleurs amusant qu'on lui décerne le prix Nobel (n'importe lequel, elle les mérite tous, même celui de médecine ; cf. son chapitre décrivant l'influence négative de la pollution sur la fertilité) ; nous verrions alors si elle aurait le bon goût de le décliner, car j'ose croire que son intégrité refusera de côtoyer des noms aussi répugnants que ceux de Milton Friedman ou Henry Kissinger (sans parler du parfait crétin John C. Eccles).
Elle n'oublie pas, vers la fin de l'ouvrage, de toujours rapporter son expérience personnelle à l'universalité de son message. Cette démarche primordiale s'inscrit dans l'éthique moderne et mûrement réfléchie qui veut que l'avenir de tous soit l'affaire de chacun. En l'occurrence, en se basant sur la naissance difficile de son premier enfant, elle analyse comment la sur-exploitation commerciale du monde a une influence néfaste, dangereuse et mortelle sur nous tous, habitants d'une planète en pleines convulsions ; que celles-ci soient agoniques ou simples signes d'une métamorphose radicale, nous n'en avons pas la certitude, mais il serait peu prudent de se montrer optimiste. La Terre que nous connaissons est en train de crever et c'est de notre faute ; si nous continuons à la violer ainsi, elle se débarrassera de nous sans le moindre regret, pour passer à autre chose, sans nous. Il nous revient donc collectivement de restaurer ce que nous avons déséquilibré ou laissé détruire. L'arsenal des solutions proposées par NK et quelques autres sont toutes valides, à appliquer d'urgence et partout dans le monde jusqu'à ce que l'ennemi plie l'échine et morde la poussière. Car c'est bien d'une guerre qu'il s'agit, celle du Capitalisme contre le Climat.
Mais cet arsenal suffira-t-il ? Je n'en suis pas convaincu.
Pour le dire autrement, je me demande si les solutions proposées dans TCE sont assez radicales. Il reste dix ans (nous disent 97 % des spécialistes en la matière, y compris ceux qui émargent chez les salopards) pour faire cesser les émissions industrielles toxiques qui étouffent l'atmosphère terrestre. Le renversement de ces vapeurs nauséabondes aurait dû se produire il y a plus de trente ans, ce qui aurait permis de le faire sans trop d'efforts ; il aurait pu se produire dès les années 1990, si les nations ayant ratifié les accords de Rio avaient respecté leur parole ; enfin, il aurait fallu profiter de la "crise" de 2008 pour mettre au pas les entités (banques, groupes d'assurance, compagnies énergétiques, institutions odieusement spéculatrices...) qui vivent du chaos mondial qu'elles engendrent par leurs politiques irresponsables et cyniques. Mais personne ne l'a fait.
Dix ans suffiront-ils à transformer l'image éthique des compagnies sociopathes ? Rendre leurs activités impopulaires (comme on l'a fait pour les fabricants de tabac dans les années 1990, obligés de débourser une somme colossale en tant que compensation sanitaire) suffira-t-il à les rendre inopérantes et inoffensives ? Remettre au goût du jour la solidarité internationale et inter-individuelle est une nécessité vitale, louable, peut-être la plus belle initiative sociale jamais entreprise depuis l'invention de la Sécurité sociale ; mais cela rendra-t-il la télévision plus cultivée ou moins publiexcitée ?
"Honorer les traités" jadis conclus entre autorités blanches conquérantes et ethnies indigènes sera une phase primordiale de la "Grande Transition" (terme qui évite de parler de Révolution, trop connotée) entamée mondialement pour effectuer le passage des énergies sales aux énergies propres / renouvelables ; en plus du fait que ce sera une première mondiale qui mettra du plomb dans la tête des patrons wasp, européens et néo-asiatiques. Comme le dit NK elle-même, tout cela ne suffira peut-être pas à renverser la vapeur, à freiner le réchauffement climatique, à arrêter l'exploitation outrancière, périlleuse et contingente des ressources planétaires (les réserves déjà stockées de carburant hydrocarboniques suffiraient pour assurer cinq fois nos dépenses énergétiques jusqu'en 2050 !) ; ce n'est pas pour autant une raison de ne pas le tenter.
Certes, mais qui empêchera les consommateurs d'exiger de brûler les réserves stockées, ce qui contribuerait à augmenter le changement climatique ? Les silos de pétrole raffiné vont-ils rester là indéfiniment, gardés par des milices pluri-ethniques qu'on espérera incorruptibles, attendant le risque d'explosion "accidentelle" qui permettra à quelqu'un de toucher l'assurance ? Et qui en sera propriétaire ? Et pourquoi les pays en voie de développement devraient-ils se mettre maintenant à l'énergie propre alors qu'ils n'ont pas contribué à l'accumulation de gaz carbonique qui dure depuis deux siècles ? Etc.
Je ne crois pas que dix ans suffiront. Tenue par son rôle de championne de la pensée centre-gauche qui ne peut se permettre de prononcer le mot Révolution sous peine d'être taxée de "communiste" (tout comme elle ne peut donner son opinion sur les causes du 9/11, sous peine de perdre la majorité de son lectorat hostile aux théories du complot), NK entrevoit la solution mais ne va pas jusqu'au bout de son raisonnement. Elle est radicale, certes mais raisonnablement ; elle ne peut s'attaquer aux racines du problème, même si elle est parfaitement consciente de leur existence, même si elle sait où les trouver, et les nommer. Le problème est simple à énoncer : le capitalisme ne saurait se réformer puisque ceux qui le défendent et le constituent sont psychologiquement (et ataviquement) incapables d'être réformés. Par définition, on ne change pas une mentalité conservatrice. C'est là une évidence si énorme qu'on ne la voit plus. Vouloir faire évoluer une mentalité capitaliste est aussi vain que d'essayer d'arrêter une centrale nucléaire avec une pelle et un seau en plastique. Tout simplement parce qu'aucun capitaliste n'est doté de ce que vous et moi appelons une conscience, une conscience humaine digne de ce nom. Bien sûr, ils ont un cerveau (souvent redoutable), une moelle épinière, un système nerveux et des sentiments, mais ce qui leur tient lieu d'"âme" (ou tout autre équivalent) n'a pas plus d'humanité qu'un micro-processeur de calculette ou un percuteur de fusil. La preuve : si c'était le cas, ils ne feraient pas ce qu'ils font.
Il reste dix ans pour faire cesser les émissions polluantes qui vont faire irrémédiablement basculer l'écosystème terrestre dans un cataclysme sans précédent de mémoire d'hommes. Intenter des procès, bloquer des projets monstrueux (au double sens du terme), faire évoluer les mentalités, briser les barrières mentales et morales, tout cela est positif, passionnant, vital. Cela peut même fonctionner, être efficace et salvateur ; mais sera-ce définitif ? Je veux dire : est-ce que cela suffira à éradiquer la mentalité capitaliste ?
Je ne crois pas. Cela ne fera pas disparaître les "salopards", qui ne baisseront pas les bras et ne seront pas plus pauvres qu'avant ; dans dix ans, les gouvernements qui se prétendent démocratiques seront toujours en place ; les Obama sans griffes et les Hollande sans tripes seront remplacés par d'autres fantoches ou par des "SarBerluskonazi", parce que les modes électoraux n'auront pas changé. L'argent investi aujourd'hui par trillions de dollars attendra toujours de rapporter ses dividendes à la même poignée d'ordures, qui ne seront pas en prison ni guillotinées ni pendues ni portées disparues. Les démocraties (y compris ces pays qui se prétendent tels alors qu'ils ont à leur tête une couronne héréditaire richissime) pratiqueront toujours la Raison d'État inscrite à leur Constitution, qui leur permet de garder la conscience tranquille tout en commettant les trahisons les plus abjectes, comme ils l'ont toujours fait depuis la Grèce et la Rome antiques, parce que nous n'avons toujours pas trouvé de moyen de neutraliser efficacement un "élu" que son pouvoir a rendu amnésique.
Rien de tout cela ne saurait être assez radical.
Tant qu'il y aura des Bourses ouvertes à la spéculation financière, il y aura des capitalistes, c'est-à-dire des gens pour qui la valeur d'une vie humaine compte moins que celle d'un titre de propriété. Tant que les Lois seront fondées sur la défense de ceux qui possèdent contre ceux qui n'ont rien, il y aura un riche pour des millions de pauvres. Et tant qu'il y aura des super-riches, il y aura des pauvres lâches pour les défendre contre le reste du monde.
Voic un exemple concret de ce que je veux dire : à la page 414, NK écrit « Aussi avons-nous besoin d'argent, nous avons besoin de technologies, afin d'agir différemment. Ce qui veut dire que le monde riche doit payer sa dette climatique. » C'est là que je ne la rejoins pas. Car, que le monde riche paye enfin sa dette climatique, soit ; mais pourquoi, une fois de plus, désigner un coupable collectif alors que nous savons pertinemment qui sont les coupables individuels ? Pour autant que je sache, les 200 connards fortunés qui se réunissent annuellement à Davos pour se partager le gâteau du monde ne sont pas masqués ! Pourquoi chercher l'argent nécessaire à la Grande Transition dans l'entraide internationale ou dans les poches des bénévoles ou dans les subventions charitables d'institutions civiquement responsables ? Pourquoi ne pas prendre l'argent à ceux qui l'ont accumulé monstrueusement, au vu et au su de tous, en ricanant et s'auto-congratulant, en toute impunité, en estimant normal et gratifiant de détruire la nature, de fabriquer des pauvres, de maintenir des famines, de fomenter des guerres, de financer des coups d'état, de répandre la terreur, la bêtise, l'intolérance et l'indigence ?
Il ne pourra y avoir de "transition" véritable que lorsque l'avidité sera considérée comme une maladie mentale, lorsque les systèmes dits démocratiques le seront véritablement au lieu d'être des ersatz, lorsque l'argent lui-même sera une denrée périssable, lorsque les banques et les compagnies d'assurance seront des organisations nationalisées à but non lucratif, lorsque les paradis fiscaux seront éradiqués (y compris la Suisse – surtout la Suisse), bref lorsque le Capitalisme sera enfin considéré comme un Crime contre l'humanité et ses partisans traités en conséquence.
Pour ce dernier point, je suggère un acte de justice semblable à celui qui a suivi la fin de l'apartheid en Afrique du Sud : un tribunal mondial (que l'on pourrait appeler le Tribunal des Gracques) écoutera les coupables et leur donnera le choix de reconnaître leurs crimes (lesquels sont connus de tous) ou non. Ceux qui reconnaissent leurs torts seront pardonnés et laissés en liberté ; on leur attribuera le salaire minimum auquel aura droit tout un chacun grâce aux richesses équitablement redistribuées ; s'ils le désirent, leur nom pourra figurer sur un monument aux victimes du capitalisme, en tant que "repentis" ; le peuple sera invité à les traiter en égaux, sans ressentiment. Ceux qui refuseront de se sentir coupables seront stérilisés puis assignés à résidence (une de leur choix, puisqu'ils en ont plusieurs ; les autres seront données à des pauvres) jusqu'à la fin de leurs jours ; aucune communication ne leur sera permise, autre qu'avec leurs ex-semblables. On les laissera pérorer à l'infini dans le vide de leur impuissance ; et nul n'assistera à ce spectacle risible.
Mais il y a une autre urgence que NK ne me semble pas avoir envisagée. Si dix ans paraissent trop courts pour réformer le capitalisme et le rendre inopérant, sinon inoffensif, j'ai peur qu'un autre événement ne soit accompli bien avant ce délai ; je parle de la privatisation de la Justice. Qu'on ne vienne pas me dire "Cela n'arrivera jamais ; le peuple ne se laissera pas faire." Il suffit de regarder l'état du monde : tout est privatisé ou en passe de l'être. Alors, pourquoi la Justice ne le serait-elle pas ? L'idée est déjà dans l'air (cf. l'épisode "White Bear" de la série Black Mirrors ; ou la nouvelle "Le système Malley" de Miriam Allen De Ford, dans l'anthologie "Dangereuses visions", qui date de 1967...) Et si cela arrive, que pourrons-nous faire ? Brûler les tribunaux au nom de la justice..? Que deviendrons-nous alors ? Qui rendra la justice, sinon le premier quidam armé d'une hache ?

Je terminerai par une "modeste" proposition qui a pour ambition de résoudre définitivement toutes les questions d'économie. Je parlai un peu plus haut d'« argent périssable » ; je voulais dire par là que si l'argent devenait lui-même une denrée périssable, on ne pourrait plus l'accumuler à outrance ; surtout s'il se dégrade à une vitesse proportionnelle à son cumul (plus on en a, plus il se corrompt vite et perd de sa valeur). Exit la mentalité capitaliste ; fini le règne des maîtres du monde ; kaput les projets privés monstrueux qui se font au prix des vies humaines et de l'écologie planétaire.
Enfin et surtout, le corollaire de cette idée est que l'unité monétaire de base sera irréductible, incessible et inaliénable ; chaque être humain s'en verra attribuer une à sa naissance et elle garantira un repas sain par jour.
Je propose d'appeler cette monnaie : le klein. (Ou bien, si notre égérie canadienne n'est pas d'accord: le hobbit.)

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