lundi 7 mars 2016

Les clichés littéraires vivent plus longtemps que les écrivains

 Voilà.. je viens d'apprendre par e-mail que mon éditeur Le Peuple de Mü a décidé -sans concerter les auteurs- de repousser la sortie des volumes 2 et +1 (l'application numérique) de la saga Les Vicariants à novembre 2016. Etant donné les retards habituels en la matière, cela signifie donc qu'ils ne sortiront certainement qu'au cours du premier trimestre 2017.

Or, cela signifie aussi que je ne toucherai pas le moindre centime avant que cette sortie ne soit effective (et encore, sans la moindre garantie ni recours en cas de non versement) ; je vais donc devoir vivre les prochains mois sans cet argent, pourtant prévu depuis plus d'un an et demi.
Pire encore, un autre de mes projets a lui aussi été repoussé par son éditeur (quelqu'un qui commence ses phrases par "Moi, je veux que.." et qui estime connaître "le" goût "du" public par coeur) à décembre 2017.
Et un autre a été repoussé.. aux Calendes grecques.
(Soit dit en passant, ce genre de délais délirants projetés dans l'avenir lointain évoque plutôt le milieu du cinéma. Je devrais me lancer là-dedans; j'y serais peut-être moins dépaysé / déçu / dégoûté / débecté).
Tout cela vient s'ajouter au fait que ma demande de résidence en Nouvelle-Zélande a été refusée sous le prétexte lumineux que mon projet était "trop compliqué pour le public général"; il s'agissait d'un diptyque: un récit en France, un autre en Nouvelle-Zélande, les deux se déroulant aux antipodes l'un de l'autre. Vachement compliqué, pas vrai?
Puis-je mentionner les deux demandes de subvention faites auprès d'institutions françaises qui n'ont même pas daigné répondre oui, non, peut-être ou merde? Merci pour les bouquins perdus; ça me fait plaisir, c'est cadeau, j'en ai plein d'autres.. Ah tiens, non: j'en ai plus. Du coup, je ne peux plus présenter d'autres dossiers, et vous n'avez plus à vous fatiguer à les refuser. C'est bien étudié, quand même !

"Eh, mais attends: c'est chouette," me direz-vous, "te voilà libre de faire autre chose!"
C'est clair; libre de crever doucement. Ou alors, ai-je envie d'ajouter: "Libre de faire complètement autre chose. Radicalement autre chose. Définitivement autre chose."

J'aurais bien voulu traduire en mots ce que je ressens maintenant: un mélange de nausée, de colère, de déception, avec un petit crépitement de kalachnikov au loin, qui se rapproche.. et cette "envie de détruire quelque chose de beau", comme disait Tyler Durden (enfin, son alter ego: Chuck Palahniuk). Mais à quoi bon, pas vrai? D'abord, ce n'est qu'un état passager; et puis c'est connu, les écrivains sont résilients, pour employer un terme à la mode psychosociale; la preuve: "Plus ils ont de contraintes, mieux ils créent."

A un détail près: il y a toujours une contrainte qui finit par être la dernière, celle qui brise la structure et fait couler le navire. En attendant, on continue à me ballotter de ci de là; le mal de mer est proche.

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